Jurisprudence : E-commerce
Tribunal de grande instance de Mulhouse Jugement correctionnel du 12 janvier 2006
Ministère public / Marc W.
acte de commerce - e-commerce - immatriculation - particulier - professionnel - registre - statut de commerçant - vente en ligne
PROCEDURE
Marc W. a été avisé de la date d’audience par procès verbal de convocation en justice délivré par officier ou agent de police judiciaire en date du 18 novembre 2005, sur instruction de Monsieur le Procureur de la république, en application de l’article 390-1 du code de procédure pénale ; cette convocation vaut citation à personne ;
Le prévenu comparaît ; il convient de statuer contradictoirement à son encontre en application de l’article 410 du code de procédure pénale ;
Marc W. est prévenu :
– d’avoir, à Kembs Loechle, entre 2003 et le 2 mai 2005, en tout cas sur le territoire national et depuis temps n’emportant pas prescription, exercé à but lucratif une activité de production, de transformation, de réparation, de prestation de services, ou accompli un acte de commerce, en l’espèce la vente sur internet de biens mobiliers, en se soustrayant intentionnellement à ses obligations, en l’espèce sans avoir requis son immatriculation au répertoire des métiers ;
faits prévus par les articles L 362-3 al. 1, L 324-9, L 324-10, L 324-11, L 320, L 143-3 du code du travail et réprimés par les articles L 362-3 al. 1, L 362-4, L 362-5 du code du travail ;
– d’avoir, à Kembs Loechle, entre 2003 et le 2 mai 2005, en tout cas sur le territoire national et depuis temps n’emportant pas prescription, exerçant une activité professionnelle comportant la vente d’objets mobiliers usagés ou acquis à des personnes autres que celles qui les fabriquent ou en font le commerce, omis de tenir jour par jour, un registre contenant une description des objets acquis ou détenus en vue de la vente ou l’échange en permettant l’identification de ces objets ainsi que les personnes qui les ont vendus ou apportés à l’échange ;
faits prévus par l’article 321-7 al. 1 du code pénal et réprimés par les articles L 321-7 al. 1, L 321-9 du code pénal ;
FAITS
Dans le cadre d’une procédure pénale ouverte devant le tribunal de grande instance de Nancy, une perquisition a été effectuée au domicile de Marc W. le 2 mai 2005. Les enquêteurs ont découvert de nombreux objets dont certains étaient mis en vente sur internet.
Il est en outre établi que Marc W. a vendu sur un site internet plus de 470 objets en deux ans. L’historique des trois derniers mois de ventes indique un montant de 6917,05 €.
Entendu, Marc W. a déclaré être un passionné d’objets anciens accumulés au fil des années, dont il avait décidé de se débarrasser, le seul moyen trouvé étant le site internet www.ebay.fr. Il soutient être un particulier et non un professionnel.
A l’audience, il a maintenu les mêmes arguments de défense et a plaidé la relaxe.
DISCUSSION
Sur l’action pénale :
Suivant les dispositions de l’article L 324-10 du code du travail, est réputé travail dissimulé par dissimulation d’activité, l’accomplissement à but lucratif d’actes de commerce par toute personne physique n’ayant pas, intentionnellement, requis son immatriculation au répertoire des métiers.
Selon les termes de l’article L 324-11 du code du travail, ces activités sont présumées, sauf preuve contraire, accomplies à titre lucratif lorsque leur fréquence ou leur importance est établie.
Le site internet utilisé permet la mise aux enchères et la vente d’objets mobiliers. Il résulte du dossier que Marc W. acquérait régulièrement des objets notamment sur internet ou sur des marchés aux puces et les vendait. En effet, l’analyse de l’historique des « pseudos » utilisés par Marc W., en particulier durant la période du 22 octobre 2003 au 1er février 2005, met en évidence un volume des achats et des ventes effectués concomitamment et sensiblement équivalent. Ces éléments suffisent à caractériser l’achat en vue de la revente et, à établir l’existence d’actes de commerce. A cet effet, l’achat et la revente dans un court délai du vase d’origine frauduleuse le démontrent clairement.
Marc W. admet avoir acquis des objets sur ce site internet mais aussi sur des marchés aux puces ou auprès d’antiquaires. Il ne conteste pas avoir vendu sur ce site au moins 470 objets sur une période de deux ans. La fréquence de ces actes de commerce est établie. En outre, le montant des ventes déterminé à 6917,05 € entre le 2 février 2005 et 5 mai 2005 ainsi que la durée des achats et des ventes sur deux ans soulignent l’importance de ces opérations.
Marc W. n’apporte pas d’élément contraire.
Le caractère intentionnel de l’infraction résulte de la volonté de l’intéressé de se soustraire à la fois aux limites imposées aux non professionnels et aux règles encadrant l’activité des professionnels, et résultant notamment du code du travail.
Marc W. reconnaît que le recours à ce site internet était un moyen de vendre mieux et davantage puisqu’il savait qu’un non professionnel ne pouvait effectuer ces opérations qu’une fois par an sur un marché aux puces. Il avait en outre, la conscience de pratiquer la même activité que des antiquaires. Il n’ignorait pas, pour connaître leurs usages, l’obligation d’immatriculation incombant à ces professionnels.
Au surplus, le fait que le prévenu ait un emploi en Suisse et le caractère secondaire des revenus tirés de ces actes de commerce, sont sans effet sur la qualification pénale. Les éléments constitutifs de l’infraction n’exigent pas que l’activité à but lucratif soit exercée exclusivement ou principalement par le prévenu.
Il n’existe aucune raison d’exclure le site internet de la réglementation qui est générale et ne comporte en l’état aucune exception en la matière.
Marc W. n’a jamais tenu de registre. Or, il est établi qu’il se comportait comme un professionnel. Dès lors, en raisons de ses activités incluant la vente d’objets mobiliers usagés ou acquis à des personnes autres que celles qui les fabriquent ou qui en font le commerce, il devait tenir un registre.
En conséquence, les éléments constitutifs des infractions sont caractérisés. Il échet de déclarer coupable Marc W. des faits qui lui sont reprochés.
Le casier judiciaire de Marc W. ne présente aucune mention de condamnation. Il y a lieu de le condamner à une peine d’amende assortie partiellement du sursis.
DECISION
Statuant publiquement, en premier ressort,
Par jugement contradictoire, à l’égard de Marc W. ;
. Déclare Marc W. coupable des faits qui lui sont reprochés,
. Condamne Marc W. :
– à une amende délictuelle de 3800 €,
. Dit qu’il sera sursis à l’exécution de la peine d’amende qui vient d’être prononcée à hauteur de 2300 € ;
Le président a averti le condamné que s’il commet une nouvelle infraction, il pourra faire l’objet d’une nouvelle condamnation qui sera susceptible d’entraîner l’exécution de la première condamnation sans confusion avec la seconde et qu’il encourra les peines de la récidive dans les termes des articles 132-8 à 132-16 du code pénal ;
– pour l’infraction de exécution d’un travail dissimulé,
– pour l’infraction de non tenue du registre par un revendeur d’objets mobiliers.
Le président avise le condamné que s’il s’acquitte du montant de l’amende prononcée dans un délai d’un mois à compter de la date à laquelle le jugement a été prononcé, ce montant est diminué de 20%, sans que cette diminution puisse excéder 1500 €.
Le président informe le condamné que le paiement de l’amende ne fait pas obstacle à l’exercice des voies de recours.
La présente décision est assujettie à un droit fixe de procédure d’un montant de 90 € dont est redevable chaque condamné ;
Le tout en application des articles 406 et suivants et 485 du code de procédure pénale.
Le tribunal : Mme Garnier (président), MM. Litolff et Seitz (juges assesseurs)
Avocat : Me Facchin
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