Jurisprudence : E-commerce
Cour d’appel de Paris 9ème chambre, section B Arrêt du 8 avril 2009
Conseil des ventes volontaires / Encherexpert et autres
condamnation - e-commerce - électronique - enchères - ventes
PROCEDURE
La saisine et la prévention
La société Encherexpert, David C. et Thomas D. ont été cités à la requête du procureur de la République sous les préventions :
Pour la société Encherexpert :
d’avoir à Paris et sur le territoire national, depuis le 28 octobre 2005, ou en tout cas depuis temps non couvert par la prescription pénale, exercé sans agrément du conseil des ventes volontaires sur le site www.encherexpert.com une activité de courtage aux enchères réalisées à distance par voie électronique et portant sur des biens culturels telles qu’elles sont visées à l’article L 321-3 al. 3 du code de commerce, en l’espèce notamment :
– pour la seule période comprise entre le 29 juin et le 11 juillet 2006
– portant sur un « dessin tableau Fernand Maillaud, tête de femme signé », « un argentier ancien Louis XVI meuble rare », « un violon breton Mirecourt 1899 », « un violon Mirecourt cône et fils Lyon 1918 numéroté », « un violon Mirecourt reproduction Stradivarius », « un violon allemand modèle Fendt vernis foncé », « un guéridon tripode Napoléon III », « une travailleuse Louis Philippe en marqueterie », » un décamètre ancien », « un phonogramme Gramophone La voix de son maître », de nombreux appareils photos anciens, une montre à gousset en « plaqué or » ;
faits prévus par les articles L 321-15 §1 1er, L 321-5, L 321-4, L 321-1, L 321-3 du code de commerce et réprimés par l’article L 321-15 §1 §11 du code de commerce,
d’avoir à Paris, depuis le 28 octobre 2005, et en tout cas sur le territoire national et depuis temps non couvert par la prescription pénale, effectué sans agrément du conseil des ventes volontaires, des ventes aux enchères publiques soumises à l’agrément du conseil, en l’espèce en proposant des biens aux enchères publiques par voie électronique en agissant comme mandataire des propriétaires, avec adjudication au mieux disant des enchérisseurs et facturation des frais de transaction et en réalisant des opérations telles qu’elles sont visées à l’article L 321-3 du code de commerce ;
faits prévus par les articles L 321-15 §1 1er, L 321-5, L 321-4, L 321-1, L 321-3 du code de commerce et réprimés par l’article L 321-15 §1 §11 du code de commerce,
d’avoir à Paris entre le 1er juillet 2006 et le 22 avril 2007, et en tout cas sur le territoire national et depuis temps non couvert par la prescription pénale, exerçant une activité professionnelle comportant la vente d’objets mobiliers usagés, ou acquis à des personnes autres que celles qui les fabriques ou en font le commerce, omis, y compris par négligence, de tenir un registre jour par jour contenant une description des objets acquis ou détenus en vue de la vente ou de l’échange et permettant l’identification des objets ainsi que celle des personnes dont ils proviennent ;
faits prévus par les articles 321-8 al. 2, 321-7 al. 1, R. 321-3 du code pénal, et réprimés par les articles 321-8 al. 2, al. 1, 321-9 du code pénal,
d’avoir à Paris depuis le 18 mars 2006, et en tout cas sur le territoire national et depuis temps non couvert par la prescription pénale, exerçant une activité professionnel comportant la vente d’objets mobiliers usagés ou acquis à des personnes autres que celles qui les fabriquent ou en font le commerce, omis y compris par négligence, de tenir un registre jour par jour contenant une description des objets acquis ou détenus en vue de la vente ou de l’échange et permettant l’identification des objets ainsi que celle des personnes dont ils proviennent,
faits prévus par les articles 321-8 al. 2, 321-7 al. 1, R. 321-3 du code pénal, et réprimés par les articles 321-8 al. 2, al. 1, 321-9 du code pénal,
d’avoir à Paris et sur le territoire national, courant mai 2006, et depuis temps non couvert par la prescription pénale, effectué au profit de la société Encherexpert une publicité comportant des allégations, indications ou présentations fausses ou de nature à induire en erreur, en l’espèce en agréant un interview à vocation publicitaire sur le site www.linternaute.com prétendant faussement :
– que la société employait des vendeurs capables de procéder à des expertises, et qu’il s’agissait d’experts formés sur les objets d’art, en particulier pour bien connaître les styles « Napoléon, Renaissance, Louis Philippe » et précisant « Les gens apprécient notre expertise et notre professionnalisme pour tous les types d’objet, mais je dois avouer que nos compétences en matière de meubles d’époque surprennent toujours » ;
– que l’interviewé David C. « était créateur de la société » avec deux autres personnes, ce qui supposait une société composée de trois associés ce qui n’était pas le cas, David C. citant par ailleurs « ses associés » alors qu’il n’était en droit ni gérant, ni associé de cette société, et publiant dans l’article en cause plusieurs photographies dont une le montrant tenant des objets à vendre et une autre le mettant en scène derrière un ordinateur dans un bureau accréditant sa position officielle dans la société ;
faits prévus par les articles L 121-1, L 121-5, L 213-6 al. 1 du code de la consommation, L 121-2 du code pénal, et réprimés par les articles L 213-6 al. 2, L 121-6, L 213-1 du code de la consommation, 131-38, 131-39 2ème, 3ème, 4ème, 5ème, 6ème, 7ème, 8ème, 9ème du code pénal,
Pour David C.
d’avoir à Paris et sur le territoire national, depuis le 28 octobre 2005, ou en tout cas depuis temps non couvert par la prescription pénale, exercé sans agrément du conseil des ventes volontaires sur le site www.encherexpert.com une activité de courtage aux enchères réalisées à distance par voie électronique et portant sur des biens culturels telles qu’elles sont visées à l’article L 321-3 al. 3 du code de commerce, en l’espèce notamment :
– pour la seule période comprise entre le 29 juin et le 11 juillet 2006
– portant sur un « dessin tableau Fernand Maillaud, tête de femme signé », « un argentier ancien Louis XVI meuble rare », « un violon breton Mirecourt 1899 », « un violon Mirecourt cône et fils Lyon 1918 numéroté », « un violon Mirecourt reproduction Stradivarius », « un violon allemand modèle Fendt vernis foncé », « un guéridon tripode Napoléon III », « une travailleuse Louis Philippe en marqueterie », » un décamètre ancien », « un phonogramme Gramophone La voix de son maître », de nombreux appareils photos anciens, une montre à gousset en « plaqué or » ;
faits prévus par les articles L 321-15 §1 1er, L 321-5, L 321-4, L 321-1, L 321-3 du code de commerce et réprimés par l’article L 321-15 §1 §11 du code de commerce,
d’avoir à Paris, depuis le 28 octobre 2005, et en tout cas sur le territoire national et depuis temps non couvert par la prescription pénale, effectué sans agrément du conseil des ventes volontaires, des ventes aux enchères publiques soumises à l’agrément du conseil, en l’espèce en proposant des biens aux enchères publiques par voie électronique en agissant comme mandataire des propriétaires, avec adjudication au mieux disant des enchérisseurs et facturation des frais de transaction et en réalisant des opérations telles qu’elles sont visées à l’article L 321-3 du code de commerce ;
faits prévus par les articles L 321-15 §1 1er, L 321-5, L 321-4, L 321-1, L 321-3 du code de commerce et réprimés par l’article L 321-15 §1 §11 du code de commerce,
d’avoir à Paris entre le 1er juillet 2006 et le 22 avril 2007, et en tout cas sur le territoire national et depuis temps non couvert par la prescription pénale, exerçant une activité professionnelle comportant la vente d’objets mobiliers usagés, ou acquis à des personnes autres que celles qui les fabriques ou en font le commerce, omis, y compris par négligence, de tenir un registre jour par jour contenant une description des objets acquis ou détenus en vue de la vente ou de l’échange et permettant l’identification des objets ainsi que celle des personnes dont ils proviennent ;
faits prévus par les articles 321-8 al. 2, 321-7 al. 1, R. 321-3 du code pénal, et réprimés par les articles 321-8 al. 2, al. 1, 321-9 du code pénal,
d’avoir à Paris depuis le 18 mars 2006, et en tout cas sur le territoire national et depuis temps non couvert par la prescription pénale, exerçant une activité professionnel comportant la vente d’objets mobiliers usagés ou acquis à des personnes autres que celles qui les fabriquent ou en font le commerce, omis y compris par négligence, de tenir un registre jour par jour contenant une description des objets acquis ou détenus en vue de la vente ou de l’échange et permettant l’identification des objets ainsi que celle des personnes dont ils proviennent,
faits prévus par les articles 321-8 al. 2, 321-7 al. 1, R. 321-3 du code pénal, et réprimés par les articles 321-8 al. 2, al. 1, 321-9 du code pénal,
d’avoir à Paris et sur le territoire national, courant mai 2006, et depuis temps non couvert par la prescription pénale, effectué au profit de la société Encherexpert une publicité comportant des allégations, indications ou présentations fausses ou de nature à induire en erreur, en l’espèce en agréant un interview à vocation publicitaire sur le site www.linternaute.com prétendant faussement :
– que la société employait des vendeurs capables de procéder à des expertises, et qu’il s’agissait d’experts formés sur les objets d’art, en particulier pour bien connaître les styles « Napoléon, Renaissance, Louis Philippe » et précisant « Les gens apprécient notre expertise et notre professionnalisme pour tous les types d’objet, mais je dois avouer que nos compétences en matière de meubles d’époque surprennent toujours » ;
– qu’il « était créateur de la société » avec deux autres personnes et citait par ailleurs « ses associés » alors qu’il n’était en droit ni gérant, ni associé de cette société, indiquant qu’il se « consacrait 100% à cette activité » et publiant dans l’article en cause plusieurs photographies dont une le montrant tenant des objets à vendre et une autre le mettant en scène derrière un ordinateur dans un bureau ;
faits prévus par les articles L 121-1, L 121-5, L 213-6 al. 1 du code de la consommation, L 121-2 du code pénal, et réprimés par les articles L 213-6 al. 2, L 121-6, L 213-1 du code de la consommation,
Pour Thomas D.
d’avoir à Paris et sur le territoire national, depuis le 28 octobre 2005, ou en tout cas depuis temps non couvert par la prescription pénale, exercé sans agrément du conseil des ventes volontaires sur le site www.encherexpert.com une activité de courtage aux enchères réalisées à distance par voie électronique et portant sur des biens culturels telles qu’elles sont visées à l’article L 321-3 al. 3 du code de commerce, en l’espèce notamment :
– pour la seule période comprise entre le 29 juin et le 11 juillet 2006
– portant sur un « dessin tableau Fernand Maillaud, tête de femme signé », « un argentier ancien Louis XVI meuble rare », « un violon breton Mirecourt 1899 », « un violon Mirecourt cône et fils Lyon 1918 numéroté », « un violon Mirecourt reproduction Stradivarius », « un violon allemand modèle Fendt vernis foncé », « un guéridon tripode Napoléon III », « une travailleuse Louis Philippe en marqueterie », » un décamètre ancien », « un phonogramme Gramophone La voix de son maître », de nombreux appareils photos anciens, une montre à gousset en « plaqué or » ;
faits prévus par les articles L 321-15 §1 1er, L 321-5, L 321-4, L 321-1, L 321-3 du code de commerce et réprimés par l’article L 321-15 §1 §11 du code de commerce,
d’avoir à Paris, depuis le 28 octobre 2005, et en tout cas sur le territoire national et depuis temps non couvert par la prescription pénale, effectué sans agrément du conseil des ventes volontaires, des ventes aux enchères publiques soumises à l’agrément du conseil, en l’espèce en proposant des biens aux enchères publiques par voie électronique en agissant comme mandataire des propriétaires, avec adjudication au mieux disant des enchérisseurs et facturation des frais de transaction et en réalisant des opérations telles qu’elles sont visées à l’article L 321-3 du code de commerce ;
faits prévus par les articles L 321-15 §1 1er, L 321-5, L 321-4, L 321-1, L 321-3 du code de commerce et réprimés par l’article L 321-15 §1 §11 du code de commerce,
d’avoir à Paris entre le 1er juillet 2006 et le 22 avril 2007, et en tout cas sur le territoire national et depuis temps non couvert par la prescription pénale, exerçant une activité professionnelle comportant la vente d’objets mobiliers usagés, ou acquis à des personnes autres que celles qui les fabriques ou en font le commerce, omis, y compris par négligence, de tenir un registre jour par jour contenant une description des objets acquis ou détenus en vue de la vente ou de l’échange et permettant l’identification des objets ainsi que celle des personnes dont ils proviennent ;
faits prévus par les articles 321-8 al. 2, 321-7 al. 1, R. 321-3 du code pénal, et réprimés par les articles 321-8 al. 2, al. 1, 321-9 du code pénal,
d’avoir à Paris depuis le 18 mars 2006, et en tout cas sur le territoire national et depuis temps non couvert par la prescription pénale, exerçant une activité professionnel comportant la vente d’objets mobiliers usagés ou acquis à des personnes autres que celles qui les fabriquent ou en font le commerce, omis y compris par négligence, de tenir un registre jour par jour contenant une description des objets acquis ou détenus en vue de la vente ou de l’échange et permettant l’identification des objets ainsi que celle des personnes dont ils proviennent,
faits prévus par les articles 321-8 al. 2, 321-7 al. 1, R. 321-3 du code pénal, et réprimés par les articles 321-8 al. 2, al. 1, 321-9 du code pénal,
– d’avoir à Paris, dans les jours suivant l’audition de police du 25 avril 2007, et en tout cas sur le territoire national et depuis temps non couvert par la prescription pénale, omis de présenter à l’autorité compétente le registre relatif à l’établissement exploité par la société Encherexpert ;
faits prévus par les articles 321.8 al. 2, 321-7 al. 1, 321-3 du code pénal, et réprimés par les articles 321-8 al. 2, al. 1, 321-9 du code pénal.
LE JUGEMENT
Le tribunal statuant publiquement, et par jugement contradictoire à l’encontre de la société Encherexpert, David C., Thomas D., prévenus, à l’égard du conseil des ventes volontaires de meubles aux enchères publiques, partie civile ;
Sur l’action publique :
* a déclaré la société Encherexpert non coupable et l’a relaxée des fins de la poursuite pour les faits qualifiés de :
– refus de présentation, par un revendeur, du registre d’objets mobiliers,
fait commis entre le 1er juillet 2006 et le 22 avril 2007, à Paris,
– refus de présentation, par un revendeur, du registre d’objets mobiliers,
faits commis depuis le 18 mars 2006, à Paris,
– publicité mensongère ou de nature à induire en erreur par personne morale,
faits commis courant mai 2006, à Paris,
– organisation de vente volontaire de meuble aux enchères publiques par une société non agréée,
faits commis depuis le 28 octobre 2005, à Paris (portant sur des biens culturels),
* a déclaré la société Encherexpert coupable pour les faits qualifiés de :
– organisation de vente volontaire de meuble aux enchères publiques par une société non agréée,
faits commis du 10 mai 2007 au 28 décembre 2007, à Paris.
Vu les articles susvisés :
* a condamné la société Encherexpert à une amende délictuelle de 3000 €,
* a déclaré David C. non coupable et l’a relaxé des fins de la poursuite pour les faits qualifiés de :
– organisation de vente volontaire de meuble aux enchères publiques par une société non agréée,
faits commis depuis le 28 octobre 2005, à Paris (portant sur des biens culturels),
– refus de présentation, par un revendeur, du registre d’objets mobiliers,
fait commis entre le 1er juillet 2006 et le 22 avril 2007, à Paris,
– refus de présentation, par un revendeur, du registre d’objets mobiliers,
faits commis depuis le 18 mars 2006, à Paris,
– publicité mensongère ou de nature à induire en erreur,
faits commis courant mai 2006, à Paris,
– organisation de vente volontaire de meuble aux enchères publiques par une société non agréée,
faits commis depuis le 28 octobre 2005 au 9 octobre 2007 et à partir du 29 décembre 2007, à Paris.
* a déclaré David C. coupable pour les faits qualifiés de :
– organisation de vente volontaire de meuble aux enchères publiques par une société non agréée,
faits commis du 10 mai au 28 décembre 2007, à Paris.
Vus les articles susvisés :
* a condamné David C. à une amende délictuelle de 1000 avec sursis,
* a dit qu’en application des dispositions de l’article 775-1 du code de procédure pénale, il ne sera pas fait mention au bulletin n°2 du casier judiciaire de David C. de la condamnation qui vient d’être prononcée.
* déclaré Thomas D. non coupable et l’a relaxé des fins de la poursuite pour les faits qualifiés de :
– organisation de vente volontaire de meuble aux enchères publiques par une société non agréée,
faits commis depuis le 28 octobre 2005, à Paris (portant sur des biens culturels),
– refus de présentation, par un revendeur, du registre d’objets mobiliers,
fait commis depuis le 18 mars 2006, à Paris,
– refus de présentation, par un revendeur, du registre d’objets mobiliers,
faits commis dans les jours suivants le 25 avril 2007, à Paris,
– organisation de vente volontaire de meuble aux enchères publiques par une société non agréée,
faits commis depuis le 28 octobre 2005 au 9 mai 2006 et à partir du 9 juin 2007, à Paris.
– refus de présentation, par un revendeur, du registre d’objets mobiliers,
fait commis entre le 1er juillet 2006 et le 22 avril 2007, à Paris,
* a déclaré Thomas D. coupable pour les faits qualifiés de :
– organisation de vente volontaire de meuble aux enchères publiques par une société non agréée,
faits commis depuis le 10 mai 2006 au 10 mai 2007, à Paris.
Vu les articles susvisés :
* a condamné Thomas D. à une amende délictuelle de 1000 avec sursis,
* a dit qu’en application des dispositions de l’article 775-1 du code de procédure pénale, il ne sera pas fait mention au bulletin n°2 du casier judiciaire de Thomas D. de la condamnation qui vient d’être prononcée
Sur l’action civile :
– a reçu le conseil des ventes volontaires de meubles aux enchères publiques en sa constitution de partie civile,
– l’a débouté de ses demandes.
[…]
DISCUSSION
Rendue après en avoir délibéré conformément à la loi,
En la forme
Considérant que les appels, intervenus dans les formes et délais de la loi, sont recevables ;
Au fond
Sur l’action pénale
Considérant que, référence faite aux énonciations du jugement déféré, il suffit de rappeler que le conseil des ventes volontaires, organisme ayant pour mission de réguler les ventes aux enchères publiques, a déposé plainte le 8 novembre 2006 à l’encontre de la société Encherexpert à Paris au motif que celle-ci procédait depuis le 18 mars 2006 à des ventes aux enchères sans posséder d’agrément, en contravention avec les dispositions des articles L 321-3 et L 321-5 du code de commerce ;
Que la société Encherexpert, dont les co-gérants étaient David C. et Thomas D., a pour activité le dépôt vente sur internet ; que dans ses publicités sur internet la société se présentait comme s’occupant de tout, de l’expertise de l’objet à la rédaction de l’annonce, du suivi des enchères à la transaction financière avec le meilleur enchérisseur et jusqu’à l’encaissement du paiement du prix de l’objet ; qu’il était indiqué sur le site le ligne que le bien était mis aux enchères sur eBay pendant dix jours et présenté aux acquéreurs éventuels en magasin ; que le site faisait état d’objets de nature très variée et même d’antiquités ;
Que Thomas D. décrivait sa société comme un dépôt vente, déclarait que selle-ci n’avait aucun lient avec eBay mais faisait toutes ses ventes en passant par ce site ; qu’il considérait que l’intervention de Encherexpert, si elle recouvrait l’ensemble du processus de mise en vente et de réalisation de celle-ci, excluait la phase des enchères qui était effectuée sur eBay ;
Que le 18 avril 2007, il a fait la déclaration à la préfecture de police d’une activité de revendeur d’objet mobilier ;
Qu’en ce qui concerne la vente de bien culturel, il indiquait en vendre très peu et contestait procéder d’une manière générale à des adjudications par enchères et n’avait pas, selon lui, à demander d’agrément ;
Que David C. apparaissait dans un article paru suite à un « entretien » du 11 mai 2006 sur le site « Iinternaute.com » comme l’un des fondateurs et associé de Encherexpert alors qu’il prétend n’avoir rejoint la société en qualité de co-gérant et d’associé que le 10 mai 2007 ; que, selon lui, il s’était investi pendant trois mois dans le projet de reprise de la société, ce qui avait du être mal compris par le journaliste ;
Que lors de son audition par les services de police, il a remis une copie du projet de création-reprise d’entreprise qu’il a adressé le 14 décembre 2005 au groupe PBI en charge de son reclassement aux termes duquel l’activité principale de la société Encherexpert est présentée comme « l’expertise dans le domaine de la vente aux enchères d’objets sur internet (eBay en particulier) et service clé en main : les clients déposent les objets qu’ils veulent vendre, la société Encherexpert les réceptionne, les stocke, les référence de façon optimale et professionnelle sur eBay, assure le suivi des ventes, répond aux questions éventuelles des acheteurs, assure la transaction financière avec le meilleur enchérisseur et rétribue le client en fonction du prix de vente final. La société se rémunère via une commission sur le prix de vente final » ;
Que par courrier du 13 juillet 2006, le conseil des ventes volontaires a mis la société Encherexpert en demeure de déposer une demande d’agrément, ladite société répondant le 30 août 2006 qu’elle agissait en qualité de mandataire du propriétaire du bien à vendre mais qu’elle ne procédait à aucune adjudication ;
Considérant, s’agissant de l’infraction d’omission de tenue d’un registre de police des objets mis à la vente telle que prévus par l’article 321-7 du code pénal reprochée aux trois prévenus, la relaxe prononcée par les premiers juges doit être confirmée dès lors que la société Encherexpert a systématiquement recensé pour chaque objet l’identité et l’adresse du déposant et établi un listing des objets comportant toutes les mentions prévues à l’article R321-3 du code pénal et qu’ainsi l’élément intentionnel de l’infraction fait défaut ;
Considérant, en ce qui concerne l’infraction de publicité mensongère reprochée à David C. et la société Encherexpert, qui résulterait de propos qui auraient été tenus par David C. devant un journaliste, la teneur de ces propos n’est pas établie avec certitude même si David C. a reconnu avoir « un peu avoir joué sur les mots » selon son expression ; que la relaxe sera également confirmée de ce chef de poursuite au bénéfice du doute ;
Considérant que l’article L 321-3 du code de commerce précise que le fait de proposer, en agissant comme mandataire du propriétaire, un bien aux enchères publiques à distance par voie électronique pour l’adjuger au mieux-disant des enchérisseurs constitue une vente aux enchères publiques, que les opérations de courtage aux enchères réalisées à distance par voie électronique, se caractérisent par l’absence d’adjudication et d’intervention d’un tiers dans la conclusion de la vente d’un bien entre les parties, ne constituent pas une vente aux enchères publiques ; que toutefois les opérations de courtage aux enchères portant sur des biens culturels réalisées à distance par voie électronique sont soumises à l’obligation d’agrément de l’article L 321-5 dudit code ;
Considérant, s’agissant de l’activité de courtage aux enchères à distance, par la voie électronique, portant sur des biens culturels, que s’il est exact que la société en disposait pas de l’agrément exigé par l’article L 321-3 alinéa 3 du code de commerce, il ressort de la procédure que les biens visés dans la prévention et dont ni l’ancienneté ni la valeur ne sont précisés, n’ont pas fait l’objet d’un courtage mais d’une vente aux enchères publiques par l’intermédiaire d’un tiers ; qu’en raison des termes de la prévention qui ne vise que le courtage, la relaxe s’impose de ce chef sans qu’il y ait lieu pour la cour de déterminer si les biens litigieux sont ou non des biens culturels et quelle est la définition d’un bien culturel et les textes applicables pour cette définition ;
Considérant, en ce qui concerne l’infraction d’organisation de vente volontaire de meubles aux enchères publiques par une société non agréée, qu’aux termes de l’article L 321-5 du code de commerce, les sociétés de vente volontaires de meubles aux enchères publiques ne peuvent exercer leur activité qu’après avoir obtenu l’agrément du conseil des ventes volontaires de meubles ; que, de plus, l’article L 320-1 du même code précise que nul ne peut faire des enchères publiques un procédé habituel de son commerce ;
Que la qualité de mandataire n’est pas contestée devant la cour dès lors que les prévenus reconnaissent que la société Encherexpert a agit pour le compte exclusif de ses vendeurs et a notamment pour mission de faire mettre en ligne et faire vendre les objets que ses clients possèdent via le site eBay ;
Qu’en l’espèce, la société Encherexpert dont la dénomination est volontairement ambiguë, indiquait que son site internet : « vous déposez. Nous vendons. Vous encaissez ». Ou encore après dépôt, « Encherexpert s’occupe de tout : expertise de l’objet, choix de la stratégie de prix avec vous… description détaillée, rédaction de l’annonce, suivie des enchères, réponse aux questions des enchérisseurs, transaction financière avec le meilleur enchérisseur, expédition… » ; également : « pour chacun de vos objets nous réalisons une annonce détaillée, illustrée de nombreuses photographies professionnelles, nous le mettons aux enchères pour 10 jours sur eBay… nous concluons la vente et sécurisons le paiement. » ;
Que s’agissant de l’expertise du bien, qui est annoncé sur le site, il s’agit en réalité, comme l’a déclaré en particulier Thomas T. le 5 février 2007, non d’une expertise mais plutôt d’un savoir-faire qui porte sur la connaissance des rouages de eBay, la façon de prendre des photographies et de les présenter aux enchères ; que le prévenu a ajouté « nous ne sommes en aucun cas des experts dans les biens artistiques » ; que le terme est néanmoins ambigu ;
Que bien que déclarant qu’il n’y a pas de prix de réserve, le même a ajouté « nos vendeurs fixent leur prix de départ et comme on ne peut aller en dessous, on peut considérer que ce prix de départ est le prix de réserve ;
Que les enchères électroniques, bien qu’elles subissent des exigences techniques spécifiques, présentent les mêmes caractéristiques que les enchères classiques ; qu’à la fin de la période fixée, il n’est plus possible de faire de nouvelles offres et c’est l’auteur de la dernière et meilleure offre dite « le meilleur enchérisseur » qui doit être déclaré adjudicataire ;
Que les prévenus qui reconnaissent qu’ils mettent les biens en vente sur le site eBay qui réalise des opérations de vente aux enchères publiques par voie électronique, lesdits biens étant attribués à l’issue des enchères au meilleur enchérisseur, ne peuvent soutenir que la société Encherexpert est étrangère à ce processus de détermination automatique de l’acheteur, au motif qu’il serait réalisé par le site eBay, dans la mesure où les conditions d’utilisation du programme « Dépôt vente partenaires » du groupe eBay auquel a adhéré contractuellement la société Encherexpert précisant expressément que celle-ci est seule responsable et seule partie contractante avec les tiers qui ont recours à ses services pour toute transaction effectuée via le site eBay n’intervient nullement dans la conclusion du contrat entre le Dépôt-vente partenaire et ses clients ;
Que les conditions d’utilisation du site eBay auxquelles la société Encherexpert a acquiescé confirment l’adjudication du bien au meilleur enchérisseur à l’issue des enchères et l’obligation de conclure la transaction ; qu’il est notamment indiqué « le non respect de votre engagement constitue une infraction aux conditions d’utilisation d’eBay et peut faire l’objet d’une action en justice par le vendeur » ;
Que dès lors c’est à tort que les prévenus soutiennent qu’il n’y a aucune obligation d’honorer la vente même si le vendeur et l’acquéreur sont tombé d’accord et tirent argument d’une prétendu faculté de rétractation de l’acquéreur pendant un délai de 7 jours ;
Qu’au demeurant, il s’agit de problèmes d’exécution de la vente et non concernant la vente elle-même ;
Que c’est bien la société Encherexpert qui organise le déroulement des enchères et détermine le délai d’enchérissement ; que ledit délai n’est qu’une adaptation nécessaire à la nature spécifique des ventes en ligne ; que les biens sont attribués à l’issue de la période d’enchères « au meilleur enchérisseur » ;
Qu’ainsi la société Encherexpert, dont l’activité repose exclusivement sur la vente d’objets par l’intermédiaire du site eBay, prend totalement en charge l’opération de vente pour le compte du vendeur qui ne connaît qu’elle et qui n’a aucun doute sur le fait qu’il s’adresse à un site de vente aux enchères, détermine toutes les modalités de vente dont les conditions de l’adjudication qui est seulement sous-traitée à eBay mais dont elle conserve la maîtrise ;
Qu’il s’ensuit que c’est à juste titre que les premiers juges ont estimé que l’activité exercée en pleine connaissance de cause, sciemment par la voie de ses dirigeants, par la société Encherexpert entrait bien dans le champ d’application des dispositions de l’article L 321-3 du code de commerce et qu’ainsi la déclaration de culpabilité du chef d’organisation de vente volontaire de meubles aux enchères publiques par une société non agréée sur le fondement des dispositions de l’article L 321-15-1° du code de commerce doit être confirmée ;
Que les sanctions de principe prononcées par les premiers juges apparaissent adaptées ;
Qu’il n’y a pas lieu d’ordonner l’affichage ou la diffusion desdites condamnations à titre de peines complémentaires ;
Sur l’action civile
Considérant que la motivation du jugement déféré selon laquelle le conseil des ventes volontaires est recevable « mais eu égard aux circonstances de l’affaire il est débouté de ses demandes » ne peut être approuvée ;
Considérant que le conseil des ventes volontaires de meubles aux enchères publiques est chargé du contrôle et de la surveillance du marché des ventes volontaires de meubles aux enchères publiques, a notamment pour mission d’agréer les sociétés de ventes volontaires et pour financement le versement de cotisations professionnelles acquittées par les sociétés de vente assises sur le montant des ventes ;
Que l’atteinte portée à l’intérêt spécifique que seul le conseil des ventes volontaires, doté de la personnalité morale, a pour mission de préserver en application des articles L 321-5 et L 321-18 du code de commerce, a causé un préjudice personnel résultant directement de l’infraction audit conseil ; que la somme de 1 euro sera allouée à la partie civile au titre du préjudice moral ;
Que la somme de 3000 €, soit 1000 € par prévenus, sera accordée à la partie civile sur le fondement des dispositions de l’article 475-1 du code de procédure pénale ;
DECISION
La cour, statuant publiquement, contradictoirement,
En la forme
. Déclare les appels recevables,
Au fond
Sur l’action publique
. Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions,
Et aussitôt, suite à sa condamnation à une amende assortie du sursis simple, le président a donné l’avertissement prévu à l’article 132-29 du code pénal, au condamné Thomas D. que s’il commet une nouvelle infraction, il pourra faire l’objet d’une condamnation qui sera susceptible d’entraîner l’exécution de la première peine sans confusion avec la seconde ;
Compte tenu de l’absence de David C. au prononcé de la décision, le président n’a pu lui donner l’avertissement prévu à l’article 132-29 du code pénal.
. Dit que si la société Encherexpert s’acquitte du montant de l’amende dans un délai d’un mois à compter de ce jour, ce montant est diminué de 20% sans que cette diminution puisse excéder 1500 € ;
. Dit que le paiement ne fait pas obstacle à l’exercice des voies de recours ;
Sur l’action civile
. Confirme le jugement déféré en ce qu’il a déclaré recevable la constitution de partie civile du conseil des ventes volontaires ;
. L’infirme pour le surplus ;
. Condamne solidairement la société Encherexpert et MM. David C. et Thomas D. à payer au conseil des ventes volontaires la somme de 1 euro au titre du préjudice moral ;
. Condamne chacun des prévenus à payer au conseil des ventes volontaires la somme de 1000 € au titre de l’article 475-1 du code de procédure pénale.
La cour : M. Christian Pers (président), Mme Irène Lebé et Marie-Christine Degrandi (conseillers)
Avocats : Me Stéphanie Lajous, Me Laurent Merlet
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