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Le Conseil constitutionnel ne bloque pas l’Afnic
La décision du 6 octobre 2010 du Conseil constitutionnel ne met pas en péril l’extension « .fr » ni l’Afnic qui le gère, elle oblige seulement le législateur à revoir sa copie. En réponse à une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) d’un titulaire d’un nom de domaine, la cour suprême a considéré que l’article L 45 du code des postes et des communications électroniques était contraire à la norme suprême. Ce texte qui avait été adopté par la loi du 9 juillet 2004 encadre les conditions dans lesquelles les noms de domaine avec une extension française sont attribués, ou peuvent être renouvelés, refusés ou retirés. Le Conseil reprend l’argumentaire de l’auteur du recours et considère que ce texte ne donne pas suffisamment de garanties aux titulaires de noms de domaine en se contentant d’indiquer que l’organisme qui gère ces adresses doit exécuter cette mission « dans l’intérêt général, selon des règles non discriminatoires rendues publiques et qui veillent au respect, par le demandeur, des droits de la propriété intellectuelle ». Pour le reste, le législateur renvoie au pouvoir réglementaire. Or, remarque le Conseil, du fait de l’importance de l’internet aujourd’hui, le choix ou l’usage des noms de domaine « affecte les droits de la propriété intellectuelle, la liberté de communication et la liberté d’entreprendre ». L’article L 45 interfère sur ces libertés constitutionnelles, sans comporter les précisions législatives suffisantes. Le Conseil en conclut que le Parlement ne doit pas abandonner ses compétences, qui relève de l’article 34 de la Constitution, au pouvoir réglementaire.
C’est toute l’architecture d’attribution des noms de domaine en « .fr » qui vient d’être ébranlée, les textes réglementaires pris sur le fondement de l’article L 45 n’ayant plus de base de légale. Mais par souci de réalisme, le Conseil constitutionnel a néanmoins reporté l’effet de sa déclaration d’inconstitutionnalité au 1er juillet 2011, afin de laisser le temps au législateur de revoir sa copie, ou plutôt au ministère de l’Industrie en charge du dossier de présenter un projet de loi rectificatif. Délai qui ne va pas être aisé à respecter étant donné l’encombrement du calendrier parlementaire.
D’ici là, l’Afnic peut continuer d’attribuer des noms de domaine sur la base du dispositif légal actuel, comme l’autorise le Conseil Constitutionnel. Si la loi n’est pas modifiée dans les délais impartis, l’attribution des noms de domaine en « .fr » ne va pas pour autant être bloquée et l’association ne va pas disparaître. Cette dernière existe depuis 1998 et pourrait continuer de fonctionner suivant les règles, et notamment sa charte de nommage, qu’elle appliquait avant la loi de 2004 et le décret du 8 février 2007 qui précise le processus de désignation des organismes chargés de gérer les extensions françaises dont le « .fr » et fixe les principes généraux de gestion. Cela risque d’être assez inconfortable pour l’Afnic.
Il faut désormais s’attendre à ce que le gouvernement en profite pour revoir et moderniser le contenu du décret de 2007 et le faire voter par le Parlement, après une éventuelle concertation, nécessairement rapide, des milieux concernés.