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Jurisprudence : Diffamation

jeudi 13 juin 2013
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Cour de cassation Première chambre civile Arrêt du 16 mai 2013

M. Patrick X... / Nice-Matin et autres

amnistie - articles - bonne foi - condamnation - diffamation - publication - site internet

DISCUSSION

Sur le moyen unique

Vu l’article 10, alinéa 2, de la Convention européenne des droits de l’homme, ensemble les articles 29 et 32 de la loi du 29 juillet 1881 ;

Attendu qu’en décembre 2009 ont été mis en ligne sur plusieurs sites internet différents articles diffusant une ancienne coupure de presse du journal « Le Petit Varois » du 11 novembre 1965 relatant et précisant que les deux jeunes gens ayant « tenu la vedette » étaient « les nommés X… Patrick et A… Alain à qui le soleil a un peu tourné la tête » ; que dans le numéro de Var Matin daté du 5 décembre 2009 a été publié un article faisant état de ces informations circulant sur le Web, intitulé « Buzz autour de l’été varois agité de X… et A… en 1965, sous titré « Web les aventures de deux jeunes parisiens en goguette avaient défrayé la chronique » dans lequel il est expliqué que « les deux compères s’étaient fait remarquer durant ce fameux été 1965 pour une affaire de siphonnage et plusieurs vols » et qu’ils avaient été condamnés par le tribunal correctionnel à un an de prison avec sursis et trois ans de mise à l’épreuve ; que des extraits de la chronique judiciaire publiée dans « Le Petit Varois » le 11 novembre 1965 sont repris, analysés et commentés par le journaliste qui observe que « cette histoire croustillante qui date quand même de plus de quarante ans fait le tour des sites Web, coupure de presse à l’appui » ; que M. X… estimant ces propos attentatoires à son honneur et à sa considération a fait assigner le 10 février 2010 la société Participation ouvrière Nice-Matin, M. Y…, directeur de publication du journal Var-Matin, ainsi que M. Z… pris en qualité de nouveau directeur de la publication du journal Var Matin aux fins de les voir condamner pour diffamation publique envers un particulier ;

Attendu que pour accorder le bénéfice de la bonne foi aux auteurs de la diffamation, la cour d’appel a énoncé qu’il était légitime, pour les journalistes, de rendre compte à leurs lecteurs, d’un fait d’actualité, à savoir les nombreux articles, circulant sur des sites internet, relatifs aux agissements, dans leur jeunesse, de deux hommes publics, ayant obtenu par la suite des mandats municipaux et législatifs, puis exercé des fonctions ministérielles, qu’au vu des pièces du dossier et des débats, contrairement à ce qui est soutenu, l’animosité personnelle n’est pas établie, que sont produits des articles, relatifs aux faits précités de 1965, ayant été diffusés sur cinq sites internet différents ainsi que des articles publiés dans Le Petit Varois et Nice Matin au sujet desquels n’est versée aucune pièce permettant d’en contester l’authenticité, qu’ils disposaient dès lors d’une base factuelle suffisante, qu’ils ont interrogé des membres du cabinet de la victime de la diffamation et recueilli leur commentaire, que le ton de l’article est plutôt humoristique et bienveillant à l’égard de l’intéressé et de son camarade, citant un parlementaire de la majorité ayant qualifié les faits de « connerie de jeune », rappelant que les faits ont été amnistiés et précisant que « la prescription l’emporte pour ces faits datant de plus de 40 ans » ;

Attendu, cependant, que si la circonstance que les écrits incriminés ont eu pour objet de porter à la connaissance du public les agissements dans leur jeunesse de deux hommes politiques peut justifier, en cas de bonne foi de leur auteur, la diffamation, il ne saurait en être ainsi, sauf à violer les textes précités, lorsqu’elle consiste dans le rappel de condamnations amnistiées, lequel est interdit sous peine de sanction pénale ;

D’où il suit qu’en statuant comme elle l’a fait, la cour d’appel a violé les textes susvisés ;

DÉCISION

Par ces motifs :

. Casse et annule, dans toutes ses dispositions, l’arrêt n° RG : 10 11177 rendu le 11 janvier 2012, entre les parties, par la cour d’appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d’appel de Versailles.

La Cour : M. Charruault (président), Mme Crédeville (conseiller)

Avocat : Me Bouthors

Notre présentation de la décision

Voir décision du TGI

 
 

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