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Suggestions : Google condamné pour faute et négligence
Ce n’est pas parce que Google ne peut se voir sanctionner pour injure concernant ses fonctions de suggestion et de recherche associée, en raison de leur caractère automatique, qu’il ne peut pas voir sa responsabilité de droit commun engagée. Partant de ce constat, le TGI de Paris a condamné Google Inc., dans un jugement du 23 octobre 2013, pour avoir refusé de supprimer des suggestions de son moteur de recherche et ne pas avoir informé les internautes sur les règles de fonctionnement de son système. La personne dont les nom et prénom avaient été associés aux termes escroc et secte a obtenu 4 000 € de réparation pour préjudice moral.
Avant de fonder sa décision sur les articles 1382 et 1383 du code civil, le tribunal a commencé par écarter l’application du délit d’injure, en raison du caractère automatique de l’apparition des suggestions dans la barre de requêtes du moteur de recherche. Il en a déduit que l’élément intentionnel de l’infraction n’était pas caractérisé. Mais il a cependant considéré que la responsabilité de droit commun peut s’appliquer dans cette espèce. Le tribunal a récusé l’argument de Google qui invoquait le principe de droit français selon lequel les propos injurieux ne peuvent être réprimés que sur le fondement du droit de la presse. Ce principe est inopérant car, ici, les propos incriminés ne sont pas le fruit de l’expression humaine mais de résultats automatiquement produits par une machine.
Pour condamner Google, le tribunal a retenu le défaut d’information de l’utilisateur du moteur de recherche sur le fonctionnement des recherches associées et le caractère imparfait de l’information donnée sur la fonction Google suggest, rebaptisée « saisie semi-automatique ». Dans ce dernier cas, un lien « en savoir plus » est proposé mais seuls 13% des utilisateurs cliquent dessus. Le tribunal a également sanctionné le moteur de recherche pour avoir refusé de supprimer les suggestions litigieuses à la demande du demandeur. « Dès lors que l’exploitant de ces fonctionnalités était à l’initiative de ces suggestions, [il] avait la possibilité de les supprimer et était informé des conséquences préjudiciables pour le demandeur de telles suggestions : […] ce refus, au seul motif du caractère « automatique » et « statistique » de ces suggestions, caractérise la faute commise au sens de l’article 1382 du code civil ».