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Jurisprudence : Droit d'auteur

jeudi 12 décembre 2013
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Cour de cassation 1ère chambre civile Arrêt du 11 décembre 2013

EPST (CNRS) / CFC, David Forest, Celog et CFC / EPST (CNRS), David Forest, Celog

accord - auteur - autorisation - cession légale - commercialisation - contrefaçon - copie - droit d'auteur - éditeur - reprographie - site inernet

Statuant sur le pourvoi n° Z 11-22.031 formé par le Centre national de recherche scientifique (CNRS) EPST, venant aux droits de la société anonyme Inist diffusion, contre un arrêt rendu le 27 mai 2011 par la cour d’appel de Paris (pôle 5, chambre 2), dans le litige l’opposant à la société Centre français d’exploitation du droit de copie (CFC), société civile, à M. David Forest, à la société Centre d’étude de logiciel – Celog -, société à responsabilité limitée à associé unique, défendeurs à la cassation ;

M. Forest a formé un pourvoi incident contre le même arrêt ;

Statuant sur le pourvoi n° G 11-22.522 formé par la société Centre français d’exploitation du droit de copie (CFC), contre le même arrêt rendu, dans le litige l’opposant au Centre national de recherche scientifique (CNRS) EPST, venant aux droits de la société anonyme Inist diffusion, à M. David Forest, à la société Centre d’étude de logiciel (Celog), défendeurs à la cassation ;

[…]

Joint les pourvois n° G 11-22.522 et Z 11-22.031 qui sont connexes ;

Donne acte à la société Inist diffusion, aux droits de laquelle se trouve le CNRS, du désistement de son pourvoi (Z 11-22.031) en ce qu’il est dirigé à l’encontre de la société Centre d’étude de logiciel (Celog) ;

DISCUSSION

Attendu, selon l’arrêt attaqué (Paris, 27 mai 2011) que M. Forest, docteur ès sciences politiques et juriste, a constaté que quatorze de ses articles, publiés dans diverses revues spécialisées, étaient commercialisés sans son accord par la société Inist diffusion sur son site Inist.com ; qu’il a assigné ladite société en contrefaçon invoquant les dispositions de l’article L. 122-10 du code de la propriété intellectuelle relatif à la reproduction des œuvres par voie de reprographie ; que la société Inist diffusion a appelé en intervention forcée et en garantie le Centre français d’exploitation du droit de copie (CFC), société de gestion collective agréée l’ayant autorisée à procéder à une telle commercialisation ;

Sur les moyens uniques des pourvois principaux du CFC et de la société Inist diffusion

Attendu que le CFC et la société Inist diffusion font grief à l’arrêt de les condamner pour contrefaçon, alors, selon le moyen :

1°/ que selon l’article L. 122-10 du code de la propriété intellectuelle, la publication d’une œuvre emporte cession du droit de reproduction par reprographie à une société de gestion collective agréée qui peut seule conclure toute convention avec les utilisateurs aux fins de gestion du droit ainsi cédé, sous la seule réserve de l’accord de l’auteur ou de ses ayants-droit pour les stipulations autorisant les copies aux fins de vente, de location, de publicité ou de promotion ; qu’il en résulte que sont seules soumises à l’accord de l’auteur ou de ses ayants-droit les clauses des conventions conclues avec les utilisateurs relativement à la réalisation de copies aux fins de vente, de location, de publicité ou de promotion, si bien qu’en retenant que le droit de reproduction par reprographie à des fins commerciales était exclu du périmètre de la cession légale, la cour d’appel a violé le texte précité ;

2°/ que l’accord de l’auteur ou de ses ayants-droit sur les stipulations autorisant les copies aux fins de vente, de location, de publicité ou de promotion n’est pas soumis à un formalisme particulier, si bien qu’en retenant que le CFC ne pouvait se prévaloir d’une autorisation de l’auteur ou de son ayant-droit compte tenu des dispositions de l’article L. 131-3 du code de la propriété intellectuelle, la cour d’appel a violé le texte précité par fausse application ;

3°/ qu’en ne recherchant pas, comme elle y était invitée par les conclusions du CFC si ce dernier n’était pas fondé à considérer que l’éditeur de l’auteur avait donné son consentement aux stipulations autorisant les copies aux fins de vente en acquiesçant aux conditions générales de reprographie aux fins de vente telles que fixées par le CFC, dans le cadre de relations continues et anciennes entre les parties et par l’acceptation des relevés annuels de droits du CFC, accompagnés de la notice de répartition précisant que le montant comprend les droits de reprographies aux fins de vente, la facturation en conséquence de l’acceptation de ces relevés par l’éditeur et l’encaissement des reversements effectués par le CFC, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article L. 122-10 du code de la propriété intellectuelle ;

4°/ qu’aux termes de l’article L. 122-10 du code de la propriété intellectuelle, la publication d’une œuvre emporte cession du droit de reproduction par reprographie à une société de gestion collective agréée qui, sauf pour elle à recueillir l’accord de l’auteur ou de ses ayants droit « pour les stipulations autorisant les copies aux fins de vente, de location, de publicité ou de promotion », peut seule alors conclure toute convention avec les utilisateurs aux fins de gestion du droit ainsi cédé ; que l’usager qui a effectué des reprographies d’une œuvre à des fins commerciales après y avoir été contractuellement autorisé par la société de gestion collective, seule titulaire de ce droit du fait de la cession légale prévue par l’article L. 122-10 du code de la propriété intellectuelle précité, ne se rend pas coupable de contrefaçon même si l’auteur n’a pas consenti à ces reprographies ; que celui-ci, qui n’est plus titulaire du droit de reprographie attaché à ses œuvres, dispose alors seulement d’une action en responsabilité à l’encontre de la société de gestion collective qui a manqué à son obligation légale ; qu’en retenant en l’espèce que le droit de reproduction commerciale par reprographie serait exclu du périmètre de la cession légale et que le consentement de l’auteur étant en toute hypothèse indispensable à l’exercice, par le CFC, du droit de reproduction par reprographie à des fins commerciales, la société Inist diffusion aurait porté atteinte aux droits patrimoniaux de M. Forest en procédant à des reprographies de ses œuvres et en les offrant à la vente sans que celui-ci n’y ait consenti, peu important quelle y ait été autorisée par le CFC, la cour d’appel a violé l’article L. 122-10 du code de la propriété intellectuelle ;

5°/ qu’en retenant que les articles litigieux de M. Forest auraient été reproduits et diffusés sur le site de la société Inist diffusion sans son autorisation quand il était constant qu’il était reproché à la société Inist diffusion non pas de publier ces articles sur son site mais, sur demande d’un client, de proposer à la vente leur reprographie, la cour d’appel a dénaturé les termes du litige en violation de l’article 4 du code de procédure civile ;

Mais attendu qu’après avoir énoncé à bon droit que si l’article L. 122-10 du code de la propriété intellectuelle instaure la cession légale du droit de reproduction par reprographie au bénéfice d’une société collective agréée pouvant seule conclure toute convention avec les utilisateurs à des fins de gestion du droit ainsi cédé, ce même texte, en réservant pour les stipulations autorisant les copies aux fins de vente, de location, de publicité ou de promotion, l’accord de l’auteur ou de ses ayants droit, exclut du périmètre de la cession légale toute utilisation à des fins commerciales desdites copies, la cour d’appel, par une exacte application de ce texte et sans dénaturer les écritures de la société Inist a exactement jugé qu’en reproduisant et en offrant à la vente les œuvres de M. Forest et en permettant cette exploitation sans avoir recueilli l’accord de ce dernier ou de ses ayants droit, les sociétés Inist diffusion et le CFC ont porté atteinte aux droits patrimoniaux d’auteur de M. Forest, lesdites sociétés n’étant pas fondées à se prévaloir d’une cession tacite ou implicite des droits d’auteur à l’éditeur ; que le moyen n’est pas fondé ;

Sur le moyen unique du pourvoi incident de M. Forest

Attendu que M. Forest fait grief à l’arrêt de rejeter sa demande fondée sur l’atteinte à son droit moral, alors, selon le moyen :

1°/ que le droit de divulguer une œuvre, attribut du droit moral d’auteur, emporte le droit de déterminer le procédé de divulgation et de fixer les conditions de celle-ci ; que ce droit n’est pas épuisé par la première publication lorsque l’œuvre peut être exploitée dans de nouvelles conditions ou sous une nouvelle forme ; que la cour d’appel qui, par motifs adoptés, a considéré que le droit de divulgation de M. Forest s’était trouvé épuisé lors de la première communication au public, a violé l’article L. 121-2 du code de la propriété intellectuelle ;

2°/ qu’en énonçant que « M. Forest évoqu[ait] un « détournement de l’environnement de l’œuvre » sans débattre de l’objet social de la société Inist diffusion, et qu’il ne sout[enait] pas qu’il entendait limiter la publication de ses articles aux seules revues « Expertises » et « Communication et langage » et qu’il faisait de la gratuité la condition de leur divulgation », tandis que M. Forest invoquait l’absence de justifications tirées de l’activité de la société Inist diffusion et se prévalait du fait que les conditions d’exploitation de ses articles par la société Inist diffusion étaient « totalement différentes de celles auxquelles l’auteur avait initialement consenti, c’est-à-dire à titre gracieux au sein d’une revue considérée comme un ensemble cohérent rassemblant des œuvres reliées par un thème commun », la cour d’appel a dénaturé les conclusions de M. Forest et violé l’article 4 du code de procédure civile ;

Mais attendu qu’il résulte des constatations de l’arrêt que les articles en cause ont été publiés antérieurement à l’exploitation litigieuse ; que le droit de divulgation s’épuisant par le premier usage qu’en fait l’auteur, la décision de la cour d’appel, qui rejette la demande formée sur le seul fondement du droit moral de divulgation, se trouve, de ce seul fait, légalement justifiée ;

DÉCISION

Par ces motifs :

. Rejette les pourvois ;

. Condamne la société Inist diffusion et le CFC aux dépens ;

. Vu l’article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Moyen produit au pourvoi principal n° Z 11-22.031 par la SCP Hémery et Thomas-Raquin, avocat aux Conseils, pour le Centre national de recherche scientifique EPST, venant aux droits de la société Inist diffusion

Il est fait grief à l’arrêt attaqué d’avoir dit qu’en cédant puis en reproduisant et en diffusant sur le site internet www.inist.fr, quatorze articles dont M. David Forest est l’auteur et ce sans son autorisation, le Centre français d’exploitation du droit de copie (CFC) et la société Inist Diffusion ont commis des actes de contrefaçon de droits d’auteur, et, en conséquence, d’avoir fait interdiction sous astreinte au CFC et à la société Inist Diffusion de poursuivre de tels agissements, d’avoir condamné la société Inist Diffusion à verser à M. David Forest la somme de 7000 € à titre de dommages-intérêts en réparation de l’atteinte portée à ses droits patrimoniaux d’auteur ;

Aux motifs propres que « Sur l’atteinte portée au droit patrimonial de M. Forest : qu’il est constant que M. Forest est l’auteur des articles litigieux et que leur exploitation et leur reproduction par reprographie, telle que définie à l’article L 122-10 alinéa 2 sus-reproduit, par les appelantes n’ont pas été autorisées par leur auteur ; que si les parties s’accordent à considérer que l’article L 122-10 sus-visé a instauré un système de gestion collective obligatoire du droit de reproduction privée à usage collectif emportant cession automatique de ce droit, que l’auteur soit membre de la société de perception et de répartition des droits ou, comme c’est le cas de M. Forest, qu’il ne le soit pas, elles se divisent sur l’interprétation qu’il y a lieu de donner à l’exception que son premier alinéa contient, à savoir : « (…) sous réserve, pour les stipulations autorisant les copies aux fins de vente, de location, de publicité ou de promotion, de l’accord de l’auteur ou de ses ayants droit » ;
que pour s’opposer à la lecture qu’en fait M. Forest, reprise par le tribunal, selon lequel la cession légale doit être cantonnée à l’utilisation non commerciale des copies, les appelantes, soutiennent que le CFC est habilité à conclure avec les utilisateurs des conventions d’utilisation de copies, et ceci quelle que soit l’utilisation qui en sera faite, du fait que la publication de l’œuvre a, en vertu de la loi, automatiquement emporté cession du droit de reproduction par reprographie à une société de perception et de répartition des droits spécialement agréée ; que, toutefois, l’argumentation qu’elles développent et qui repose essentiellement sur la rédaction de l’avant-dernier alinéa de cet article (« les dispositions du premier alinéa ne font pas obstacle au droit de l’auteur ou de ses ayants droit de réaliser des copies aux fins de vente, de location, de publicité ou de promotion ») impliquant, selon elles, que les droits de reproduction à des fins commerciales font l’objet d’une cession automatique à la société agréée, qu’elle est donc investie de ces droits, qu’elle a qualité pour délivrer une autorisation de reproduction par reprographie pour une utilisation commerciale des copies et qu’elle n’est seulement tenue, quant à l’exercice de son droit de délivrer une autorisation, qu’à une condition (« sous réserve … « ) – à savoir : le recueil de l’accord de l’auteur ou de son ayant droit – n’emporte pas la conviction ;
qu’en effet, cet article L 122-10 qui organise une cession légale du droit de reproduction par reprographie au bénéfice d’une société collective et déroge au principe de l’autorisation de l’auteur requiert une stricte interprétation ; que la réserve de l’utilisation commerciale des copies figure clairement dans le texte de cet article et, ainsi que le relève M. Forest, dès lors qu’il y autorisation, c’est à dire exercice du droit d’autoriser ou d’interdire, il ne saurait y avoir de cession automatique ; que, sauf à ajouter au dispositif mis en place par le législateur, si le texte précise que la cession légale « ne fait pas obstacle » aux droits de l’auteur, cela ne signifie pas, comme le soutiennent les appelantes, qu’il aurait automatiquement cédé ses droits de reproduction à des fins commerciales du seul fait de la publication tout en les conservant mais, au contraire, que le droit de reproduction commerciale par reprographie est exclu du périmètre de la cession légale ;
qu’indépendamment de la question du périmètre de la cession légale et, par conséquent, en toute hypothèse, le consentement de l’auteur demeure indispensable à l’exercice, par le CFC, du droit de reproduction par reprographie ; qu’à cet égard, les appelantes ne peuvent se prévaloir d’une cession tacite ou implicite des droits d’auteur à l’éditeur, compte tenu des dispositions de l’article L 131-3 du code de la propriété intellectuelle dès lors que la convention de cession doit résulter d’éléments précis ne pouvant laisser subsister aucun doute quant à son domaine et à ses modalités et que tel n’est pas le cas en l’espèce puisque M. Forest s’est borné à autoriser, le plus souvent sans contrepartie financière, leur publication dans la revue de l’éditeur ; qu’elles ne peuvent, non plus, tirer argument du fait que l’éditeur, agissant en qualité d’ayant droit de M. Forest, aurait accepté sans réserve l’exploitation et la reproduction litigieuse dans la mesure où elles ne démontrent pas qu’il était investi de droits lui en donnant qualité, ni affirmer qu’il a formalisé un accord alors qu’il le dément (pièces 28 et 32 de M. Forest) et qu’au surplus, il était précisé dans l’ours de la revue Expertises éditée par le Celog : « le Centre français du droit de copie (CFC) n’est pas mandaté pour délivrer des autorisations de reproduction de copies payantes » ;
que, sur l’absence de nécessité d’une autorisation pour ce qui la concerne, l’argument de la société anonyme Inist selon lequel elle serait investie d’une mission de service public portant sur la diffusion d’un savoir et que son activité serait déficitaire est inopérant dès lors qu’il est sans incidence sur le caractère commercial de l’activité de reprographie incriminée ; qu’il en résulte qu’en reproduisant et en offrant à la vente les œuvres de M. Forest et en permettant cette exploitation, quel qu’en soit le nombre, sans avoir recueilli l’accord de ce dernier ou de ses ayants droits sur cette exploitation et sa destination, les appelantes ont porté atteinte à ses droits patrimoniaux d’auteur ; que le jugement sera confirmé de ce chef » ;

Et aux motifs adoptés qu’ « ainsi que le soutient à juste titre M. Forest, la cession légale dont il est question, organisée par le législateur pour répondre au phénomène dit du photocopillage, et qui constitue un démembrement du droit de reproduction, a entendu distinguer entre le droit de reprographie à titre gracieux et celui qui ne l’est pas ; que c’est ainsi que l’article L.122-10 invoqué a apporté une réserve à la cession légale, en prévoyant la nécessité de l’accord de l’auteur ou de ses ayants droit « pour les stipulations autorisant les copies aux fins de vente, de location, de publicité ou de promotion » ; que dès lors que le législateur a entendu exclure de la cession légale toute utilisation des copies à des fins commerciales, que la société lnist Diffusion, ainsi qu’il l’a été rappelé, procède à une telle utilisation des copies en les cédant au prix unitaire de 13,87 €, et qu’il n’est pas contesté que M. Forest n’a donné aucun accord à cette utilisation de ses articles, il n’a subi aucune dépossession de ses droits d’auteur ; (…) Sur l’atteinte aux droits patrimoniaux : qu’aux termes de l’article L.122-4 du code de la propriété intellectuelle, « toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle faite sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants droits ou ayants cause est illicite» ; qu’en l’espèce, comme il vient de l’être évoqué, M. David Forest est l’auteur des articles suivants :
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Alors d’une part qu’aux termes de l’article L. 122-10 du code de la propriété intellectuelle, la publication d’une œuvre emporte cession du droit de reproduction par reprographie à une société de gestion collective agréée qui, sauf pour elle à recueillir l’accord de l’auteur ou de ses ayants droit « pour les stipulations autorisant les copies aux fins de vente, de location, de publicité ou de promotion », peut seule alors conclure toute convention avec les utilisateurs aux fins de gestion du droit ainsi cédé ; que l’usager qui a effectué des reprographies d’une œuvre à des fins commerciales après y avoir été contractuellement autorisé par la société de gestion collective, seule titulaire de ce droit du fait de la cession légale prévue par l’article L. 122-10 du code de la propriété intellectuelle précité, ne se rend pas coupable de contrefaçon même si l’auteur n’a pas consenti à ces reprographies ; que celui-ci, qui n’est plus titulaire du droit de reprographie attaché à ses œuvres, dispose alors seulement d’une action en responsabilité à l’encontre de la société de gestion collective qui a manqué à son obligation légale ;
qu’en retenant en l’espèce que le droit de reproduction commerciale par reprographie serait exclu du périmètre de la cession légale et que le consentement de l’auteur étant en toute hypothèse indispensable à l’exercice, par le Centre Français d’exploitation du droit de Copie (CFC), du droit de reproduction par reprographie à des fins commerciales, la société Inist Diffusion aurait porté atteinte aux droits patrimoniaux de M. Forest en procédant à des reprographies de ses œuvres et en les offrant à la vente sans que celui-ci n’y ait consenti, peu important quelle y ait été autorisée par le CFC, la cour d’appel a violé l’article L. 122-10 du code de la propriété intellectuelle.

Alors d’autre part, subsidiairement, qu’en retenant que les articles litigieux de M. Forest auraient été reproduits et diffusés sur le site de la société Inist Diffusion sans son autorisation quand il était constant qu’il était reproché à la société Inist Diffusion non pas de publier ces articles sur son site mais, sur demande d’un client, de proposer à la vente leur reprographie, la cour d’appel a dénaturé les termes du litige en violation de l’article 4 du code de procédure civile.

Moyen produit au pourvoi principal n° G 11-22.522 par la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat aux Conseils, pour la société Centre d’exploitation du droit de copie (CFC)

Ce moyen reproche à l’arrêt attaqué d’avoir dit qu’en cédant puis en reproduisant et diffusant sur le site internet www.inist.fr les quatorze articles de M. David Forest sans son autorisation, le CFC et la société Inist Diffusion ont commis des actes de contrefaçon de droits d’auteur au préjudice de ce dernier, de l’avoir condamné à verser à M. David Forest une somme de 7000 € en réparation de son préjudice patrimonial ainsi qu’une somme de 4000 € en application de l’article 700 du code de procédure civile et aux dépens ;

Aux motifs que l’article L.122-10 du code de la propriété intellectuelle qui organise une cession légale du droit de reproduction par reprographie au bénéfice d’une société collective et déroge au principe de l’autorisation de l’auteur requiert une stricte interprétation ; que la réserve de l’utilisation commerciale des copies figure clairement dans le texte de cet article et, ainsi que le relève M. Forest, dès lors qu’il y autorisation, c’est-à-dire exercice du droit d’autoriser ou d’interdire, il ne saurait y avoir de cession automatique ; que, sauf à ajouter au dispositif mis en place par le législateur, si le texte précise que la cession légale « ne fait pas obstacle » aux droits de l’auteur, cela ne signifie pas, comme le soutiennent les appelantes, qu’il aurait automatiquement cédé ses droits de reproduction à des fins commerciales du seul fait de la publication tout en les conservant mais, au contraire, que le droit de reproduction commerciale par reprographie est exclu du périmètre de la cession légale ; qu’indépendamment de la question du périmètre de la cession légale et, par conséquent, en toute hypothèse, le consentement de l’auteur demeure indispensable à l’exercice, par le CFC, du droit de reproduction par reprographie ;
qu’à cet égard, les appelantes ne peuvent se prévaloir d’une cession tacite ou implicite des droits d’auteur à l’éditeur, compte tenu des dispositions de l’article L.131-3 du code de la propriété intellectuelle dès lors que la convention de cession doit résulter d’éléments précis ne pouvant laisser subsister aucun doute quant à son domaine et à ses modalités et que tel n’est pas le cas en l’espèce puisque M. Forest s’est borné à autoriser, le plus souvent sans contrepartie financière, leur publication dans la revue de l’éditeur ; qu’elles ne peuvent, non plus, tirer argument du fait que l’éditeur, agissant en qualité d’ayant droit de M. Forest, aurait accepté sans réserve l’exploitation et la reproduction litigieuse dans la mesure où elles ne démontrent pas qu’il était investi de droits lui en donnant qualité, ni affirmer qu’il a formalisé un accord alors qu’il le dément et qu’au surplus, il était précisé dans l’ours de la revue Expertises éditée par le Celog : « le Centre français du droit de copie (CFC) n’est pas mandaté pour délivrer des autorisations de reproduction de copies payantes » ;

Alors qu’il résulte de l’article L.122-10 du code de la propriété intellectuelle que la publication d’une œuvre emporte cession du droit de reproduction par reprographie à une société de gestion collective agréée qui peut seule conclure toute convention avec les utilisateurs aux fins de gestion du droit ainsi cédé, sous la seule réserve de l’accord de l’auteur ou de ses ayants-droit pour les stipulations autorisant les copies aux fins de vente, de location, de publicité ou de promotion ; qu’il en résulte que sont seules soumises à l’accord de l’auteur ou de ses ayants-droit les clauses des conventions conclues avec les utilisateurs relativement à la réalisation de copies aux fins de vente, de location, de publicité ou de promotion, si bien qu’en retenant que le droit de reproduction par reprographie à des fins commerciales était exclu du périmètre de la cession légale, la cour d’appel a violé le texte précité .

Alors que l’accord de l’auteur ou de ses ayants-droit sur les stipulations autorisant les copies aux fins de vente, de location, de publicité ou de promotion n’est pas soumis à un formalisme particulier, si bien qu’en retenant que le CFC ne pouvait se prévaloir d’une autorisation de l’auteur ou de son ayant-droit compte tenu des dispositions de l’article L. 131-3 du code de la propriété intellectuelle, la cour d’appel a violé le texte précité par fausse application ;

Et alors qu’en ne recherchant pas, comme elle y était invitée par les conclusions du CFC si ce dernier n’était pas fondé à considérer que l’éditeur de l’auteur avait donné son consentement aux stipulations autorisant les copies aux fins de vente en acquiesçant aux conditions générales de reprographie aux fins de vente telles que fixées par le CFC, dans le cadre de relations continues et anciennes entre les parties et par l’acceptation des relevés annuels de droits du CFC, accompagnés de la notice de répartition précisant que le montant comprend les doits de reprographies aux fins de vente, la facturation en conséquence de l’acceptation de ces relevés par l’éditeur et l’encaissement des reversements effectués par le CFC, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article L. 122-10 du code de la propriété intellectuelle.

Moyen produit au pourvoi incident n° Z 11-22.031 par la SCP Baraduc et Duhamel, avocat aux Conseils, pour M. Forest

Il est fait grief à l’arrêt attaqué d’avoir rejeté la demande de M. Forest de condamnation de la société Inist Diffusion, aux droits de laquelle vient le CNRS, à réparer l’atteinte portée à son droit moral de divulgation ;

Aux motifs propres que, sur l’atteinte portée au droit moral de divulgation de M. Forest : au visa de l’article L. 121-2 du code de la propriété intellectuelle, selon lequel « l’auteur a seul le droit de divulguer son œuvre […] il détermine le procédé de divulgation et les conditions de celle-ci », M. Forest reproche au tribunal d’avoir considéré que son droit de divulgation s’est trouvé épuisé lors de cette première communication au public alors que, selon lui, le droit moral d’auteur emporte le droit de déterminer, comme il l’entend, le procédé et les conditions de divulgation de l’œuvre ; que, soutenant que ce droit ne se limite donc pas à la première communication de l’œuvre au public, il estime que les conditions d’exploitation de son œuvre par l’Inist, dans le cadre d’un service à la demande sur un site commercial, hors du contexte dans lequel elle a été créée, ont opéré un détournement des conditions de sa divulgation, à savoir à titre gracieux au sein d’une revue considérée comme un ensemble cohérent rassemblant des œuvres reliées par un thème commun ;
que, ceci rappelé, M. Forest, publiant un certain nombre d’articles autonomes dont il est l’auteur dans les revues « Expertises » et « Communication et langage », et ceci à titre gracieux, en a déterminé le procédé de divulgation et ses conditions, conformément à l’article L. 121-2 dont il se prévaut ; qu’il est constant que la société Inist Diffusion, filiale du Centre National de la Recherche Scientifique (CNRS), créée en 1990, qui a pour objet la « valorisation et la commercialisation de produits et services d’information scientifique dans les différents champs de la connaissance » et met, pour ce faire, à la disposition du public un fonds documentaire, à fait réaliser la copie sur papier des articles tels que publiés et les a commercialisés ;
que force est, toutefois, de relever que M. Forest, qui évoque un « détournement de l’environnement de l’œuvre » sans débattre de l’objet social de l’Inist, ne soutient pas qu’il entendait limiter la publication de ses articles aux seules revues « Expertises » et « Communication et langage » et qu’il faisait de la gratuité la condition de leur divulgation, la société Inist relevant pertinemment, à cet égard, que ce dernier a lui-même réuni certains des articles litigieux dans un « Abécédaire de la société de surveillance » publié en mai 2009 et vendu au prix public de 7 € ; que les procédés et conditions d’exploitation de ces articles par la société Inist ne peuvent, dans ces circonstances, être considérés comme violant l’article L. 121-2 précité, en sorte que M. Forest n’est pas fondé à prétendre qu’il a été porté atteinte à son droit moral par la divulgation litigieuse de son œuvre et que le jugement mérite, sur ce point, confirmation ;

Et aux motifs adoptes que, ainsi que le soutient la société Inist Diffusion, M. David Forest, en confiant à ses éditeurs le soin de rendre publics ses articles, avait déjà exercé ce droit, lequel s’est donc trouvé épuisé lors de cette première communication au public ; que dès lors, il y a lieu de constater qu’aucune atteinte au droit moral de M. Forest n’est caractérisée ;

1°) Alors que le droit de divulguer une œuvre, attribut du droit moral d’auteur, emporte le droit de déterminer le procédé de divulgation et de fixer les conditions de celle-ci ; que ce droit n’est pas épuisé par la première publication lorsque l’œuvre peut être exploitée dans de nouvelles conditions ou sous une nouvelle forme ; que la cour d’appel qui, par motifs adoptés, a considéré que le droit de divulgation de M. Forest s’était trouvé épuisé lors de la première communication au public, a violé l’article L. 121-2 du code de la propriété intellectuelle ;

2°) Alors qu’en énonçant que « M. Forest évoqu[ait] un « détournement de l’environnement de l’œuvre » sans débattre de l’objet social de la société Inist Diffusion, et qu’il ne sout[enait] pas qu’il entendait limiter la publication de ses articles aux seules revues « Expertises » et « Communication et langage » et qu’il faisait de la gratuité la condition de leur divulgation » (arrêt, p. 10 § 8 et 11 § 1), tandis que M. Forest invoquait l’absence de justifications tirées de l’activité de la société Inist Diffusion (concl., p. 22 et 23) et se prévalait du fait que les conditions d’exploitation de ses articles par la société Inist Diffusion étaient « totalement différentes de celles auxquelles l’auteur avait initialement consenti, c’est-à-dire à titre gracieux au sein d’une revue considérée comme un ensemble cohérent rassemblant des œuvres reliées par un thème commun » (concl., p. 26 § 13), la cour d’appel a dénaturé les conclusions de M. Forest et violé l’article 4 du code de procédure civile.

La Cour : M. Gridel (président), Mme Crédeville (conseiller rapporteur), M. Gallet, Mmes Kamara, Dreifuss-Netter, Wallon, Verdun, Ladant, M. Truchot (conseillers), Mme Darret-Courgeon, M. Vitse, Mmes Barel, Le Gall (conseillers référendaires),

Avocats : SCP Hémery et Thomas-Raquin, SCP Lyon-Caen et Thiriez, SCP Baraduc et Duhamel, SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle et Hannotin

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* Nous portons l'attention de nos lecteurs sur les possibilités d'homonymies particuliérement lorsque les décisions ne comportent pas le prénom des personnes.