Jurisprudence : Marques
Cour d’appel de Paris, Pôle 5 – Chambre 2, arrêt du 25 septembre 2015
JM Weston / Dr Martens E-Commerce LLC, Airwair International LTD et autre
concurrence déloyale - contrefaçon - e-commerce - marque - référence - reproduction du signe
Numéro d’inscription au répertoire général : 14/15558
Décision déférée à la Cour : jugement du 11 juillet 2014 – Tribunal de grande instance de Paris- 3ème chambre 2ème section – RG n°10/13152
ARRET :
Contradictoire
Par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile
Signé par Mme Marie-Christine Aimar, Présidente, et par Mme Carole Trejaut, Greffière, à laquelle la minute du présent arrêt a été remise par la magistrate signataire.
La société JM Weston, qui a pour activité la fabrication et la commercialisation de chaussures haut de gamme pour hommes, indique être notamment titulaire :
– de la marque verbale française JM Weston, déposée le 30 septembre 1986 sous le n°1 372 787 et dont le dernier renouvellement justifié est en date du 26 juin 2001, pour désigner notamment en classe 25 les “chaussures en tout genre”,
– et de la marque verbale française Weston, déposée le 22 décembre 1992 sous le n°92 447 086 et dont le dernier renouvellement justifié est en date du 31 mars 2003, pour désigner différents produits des classes 3, 14, 18 et 25, et notamment “les chaussures”.
Ayant découvert que la société Dr Martens Airwair France commercialisait des chaussures sous la dénomination Weston par le biais de son site Internet accessible à l’adresse www.drmartens.com et que ces chaussures étaient également commercialisées par le biais du site Internet accessible à l’adresse www.cloggs.eu édité par la société de droit anglais Libcol Limited, elle a, selon actes des 24 et 28 août 2010, fait assigner ces dernières en contrefaçon de marques et en concurrence déloyale.
Par acte du 25 octobre 2012, elle a fait assigner aux mêmes fins les sociétés Airwair International LTD et Dr Martens E-Commerce LLC, et les deux instances ont été jointes par ordonnance du 10 janvier 2013.
Par ordonnance du 7 octobre 2011, le juge de la mise en état a rejeté les exceptions d’incompétence et de nullité de l’assignation.
Par conclusions du 9 octobre 2013, la société JM Weston s’est désistée de son instance et de son action à l’égard de la société Libcol Limited.
Par jugement contradictoire en date du 11 juillet 2014, le Tribunal de Grande Instance de PARIS a :
– constaté le désistement d’instance et d’action de la société JM Weston à l’égard de la société Libcol Limited,
– dit n’y avoir lieu à mise hors de cause,
– déclaré irrecevable l’exception de nullité des procès-verbaux de constat,
– rejeté toutes les demandes de la société JM Weston,
– condamné la société JM Weston à payer aux sociétés Martens Airwair France, Airwair International LTD et Dr Martens E-Commerce LLC la somme globale de 5.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamné la société JM Weston aux dépens.
La société JM Weston a interjeté appel de ce jugement par déclaration au greffe en date du 21 juillet 2014.
Par dernières écritures notifiées par voie électronique le 13 février 2015, auxquelles il est expressément renvoyé, la société JM Weston demande à la cour, au visa des articles L.713-2, L.713-3, L.716-1 et suivants du Code de la propriété intellectuelle, et 1382 et 1383 du code civil, de :
– confirmer le jugement en ce qu’il a constaté le désistement d’instance et d’action à l’égard de la société Libcol Limited, déclaré irrecevable l’exception de nullité des procès-verbaux des 18 et 23 mars 2010 soulevée par les sociétés Dr Martens et dit n’y avoir lieu à la mise hors de cause de la société Dr Martens Airwair France,
– infirmer le jugement pour le surplus, et, statuant à nouveau :
– dire et juger que la société JM Weston est titulaire des marques françaises n° 1372787 JM Weston et n°92 447 086 Weston qui sont régulièrement et sérieusement exploitées par cette dernière depuis leurs dépôts,
– constater que la marque n° 92 447 086 Weston est reproduite à l’identique, pour désigner des produits identiques à ceux visés dans son dépôt, et qu’il en découle une atteinte la fonction d’indication d’origine de celle-ci, d’une part, sur le site www.dmusastore.com, édité par la société Dr Martens E-Commerce LLC , d’autre part, sur l’emballage et l’étiquette des chaussures litigieuses, produits fabriqués par la société Airwair International LTD, commercialisés sur Internet à destination du public français par la société Dr Martens E-Commerce LLC, et importés et commercialisés en France par la société Dr Martens Airwair France,
– constater que les marques n°1 372 787 JM Weston et n°92 447 086 Weston sont imitées sur le site www.drmartens.com, édité par la société Airwair International LTD, pour des produits identiques à ceux visés par lesdites marques et qu’un risque de confusion en découle,
En conséquence :
– dire et juger que les sociétés Dr Martens Airwair France, Airwair International LTD et Dr Martens E-Commerce LLC ont commis des actes de contrefaçon à l’identique au sens de l’article L. 713-2 et L. 716-1 du Code de la propriété intellectuelle,
– dire et juger que les sociétés Dr Martens Airwair France, Airwair International LTD et Dr Martens E-Commerce LLC ont également commis des actes de contrefaçon par imitation au sens des articles L. 713-3 et L. 716-1 du code de la propriété intellectuelle,
– dire et juger que les sociétés Dr Martens Airwair France, Airwair International LTD et Dr Martens E-Commerce LLC se sont en outre rendues coupables d’actes de concurrence déloyale et parasitaire au préjudice de la société JM Weston, faits répréhensibles sur le fondement des articles 1382 et 1383 du code civil,
– ordonner l’arrêt immédiat de toute exploitation par les sociétés Dr Martens Airwair France, Airwair International LTD et Dr Martens E-Commerce LLC pour le futur et à quelque titre que ce soit les marques dont elle est titulaire, seuls ou en association avec d’autres termes, couleurs ou éléments graphiques sous astreinte de 3.000 euros par infraction constatée à compter du prononcé de la décision à intervenir,
– condamner in solidum les sociétés Dr Martens Airwair France, Airwair International LTD, Dr Martens E-Commerce LLC à réparer le préjudice subi en lui versant, d’une part, une indemnité de 200.000 euros, sauf à parfaire, en réparation du préjudice résultant de la contrefaçon des marques n°1 372 787 et n°92 447 086 dont elle est titulaire et, d’autre part, une indemnité de 150.000 euros, sauf à parfaire, en réparation du préjudice subi du fait des agissements distincts des actes de concurrence déloyale et de parasitisme,
En tout état de cause,
– ordonner aux frais avancés des sociétés Dr Martens Airwair France, Airwair International LTD et Dr Martens E-Commerce LLC la publication du dispositif de l’arrêt à intervenir sur la page d’accueil du site www.drmartens.com/fr pendant une durée de 3 mois à compter de la signification de la décision à intervenir, et ce sous astreinte de 10.000 euros par jour de retard,
– ordonner aux frais avancés des sociétés Dr Martens Airwair France, Airwair International LTD et Dr Martens E-Commerce LLC la publication du dispositif de l’arrêt à intervenir dans 3 journaux ou magazines de son choix, sans que le coût de chacune de ces publications n’excède la somme de 20.000 euros hors taxes,
– débouter les sociétés Dr Martens Airwair France, Airwair International LTD et Dr Martens E-Commerce LLC de toutes leurs demandes plus amples et contraires,
– condamner in solidum les sociétés Dr Martens Airwair France, Airwair International LTD et Dr Martens E-Commerce LLC à lui payer la somme de 50.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens tant de première instance que d’appel, dont distraction au profit de son conseil.
Par dernières écritures notifiées par voie électronique le 9 juin 2015, auxquelles il est expressément renvoyé, les sociétés Dr Martens E-Commerce LLC, Airwair International LTD et Dr Martens Airwair France entendent voir :
– déclarer la société JM Weston mal fondée en son appel et la débouter de toutes ses demandes,
– confirmer le jugement du Tribunal de Grande Instance de Paris du 11 juillet 2014 en ses dispositions qui lui sont favorables,
– les recevoir en leur appel incident et les y déclarant bien fondées,
– infirmer le jugement du Tribunal de Grande Instance de Paris du 11 juillet 2014 en ce qu’il a déclaré irrecevable l’exception de nullité des procès-verbaux établis par Maître RENASSIA en date des 18 et 23 mars 2010 et dit n’y avoir lieu à la mise hors de cause de la société Dr Martens Airwair France,
Statuant à nouveau de ces chefs,
– dire et juger nuls et de nul effet les procès-verbaux établis par Maître Renassia, huissier de justice, les 18 et 23 mars 2010, ou, à tout le moins, les rejeter des débats,
– mettre purement et simplement hors de cause la société Dr Martens Airwair France,
– condamner la société JM Weston à verser à la société Dr Martens Airwair France la somme de 28.000 euros et à chacune des sociétés Airwair International LTD et Dr Martens E-Commerce LLC, la somme de 20.000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile pour la première instance et l’appel ainsi qu’aux entiers dépens tant de première instance que d’appel, qui seront recouvrés dans les conditions de l’article 699 du code de procédure civile.
L’ordonnance de clôture a été prononcée le 11 juin 2015.
DISCUSSION
Sur le désistement d’instance et d’action à l’égard de la société Libcol Limited
Considérant qu’aucune contestation n’est soulevée devant la cour quant au désistement d’instance et d’action de la société JM Weston à l’égard de la société Libcol Limited ; que le jugement doit donc être confirmé de ce chef ;
Sur la nullité des procès-verbaux de constat des 18 et 23 mars 2010
Considérant que l’appelante présente à tort le moyen tendant à la nullité des procès-verbaux de constat des 18 et 23 mars 2010 comme une exception de procédure devant être soulevée avant toute défense au fond conformément à l’article 74 du code de procédure civile alors qu’un procès-verbal de constat constitue un moyen de preuve de la contrefaçon alléguée et que l’appréciation de sa validité constitue un moyen de défense et relève du fond du débat ; que le jugement sera en conséquence infirmé en ce qu’il a déclaré irrecevables les intimées à soulever la nullité des procès-verbaux de constat d’huissier ;
Considérant que la société JM Weston a versé aux débats en cause d’appel la copie signée du procès-verbal de constat dressé le 18 mars 2010 par Maître Robert Renassia, huissier de justice associé à PARIS, de sorte que l’argumentation des intimées relative à l’absence de signature de ce procès-verbal, contenue sur six pages de leurs dernières écritures, est sans objet ;
Que l’est également l’argumentation tendant à la nullité du procès-verbal de constat du 23 mars 2010 en conséquence de la nullité du procès-verbal du 18 mars 2010 ;
Considérant que les intimées font encore valoir que les deux procès-verbaux des 18 et 23 mars 2010 seraient nuls en raison de la démarche active qu’aurait eu l’huissier, résultant notamment de l’emploi du pronom personnel [nous] dans le constat, outrepassant ainsi ses fonctions en opposition avec les principes de neutralité et d’objectivité inhérents à ses fonctions ; qu’elles ajoutent que le procès-verbal du 18 mars 2010 doit être retiré des débats en raison du désistement intervenu à l’égard de la société Libcol Limited ;
Mais considérant qu’il y a lieu de constater que le procès-verbal du 18 mars 2010 a été dressé en présence de Mr J. D. dont l’identité et le domicile sont indiqués, qui a servi de témoin à l’huissier dans le cadre du constat ;
Qu’il est indiqué que “ (…) Mr J. D. accède depuis mon PC (…) à la page d’accueil du site ‘GOOGLE’ (…), Mr J. D. tape les mots : ‘cloggs.fr’(…) et valide en tapant sur l’onglet ‘RECHERCHE GOOGLE’, Mr D. clique sur le titre (…), Mr D. clique alors sur l’onglet ‘PLUS D’INFO’ (…), Mr D. sélectionne sur ce produit la pointure 42 (…), Mr D. clique sur l’onglet PASSER LA COMMANDE (…), Mr D. valide en tapant sur l’onglet ‘COMMANDER’(…), Mr D. tape alors son adresse mail et choisit ‘nouveau client’ et valide en cliquant sur l’onglet ‘CONTINUER’(…), Mr D. règle l’achat du produit (…)” ;
Que dans ces conditions, le pronom “nous” a pu être à juste titre être employé pour décrire l’action réalisée par le témoin et constatée par l’huissier ;
Considérant qu’il n’est donc pas démontré en quoi l’huissier aurait outrepassé ses pouvoirs de constatations étant observé que le témoin a créé lui-même le compte client nécessaire à l’achat et a procédé personnellement au règlement, le produit commandé ayant par la suite été livré à Me Robert Renassia et réceptionné en l’étude de l’huissier selon procès-verbal de constat du 23 mars 2010 ;
Considérant, par ailleurs, que la force probante des copies d’écrans est soumise à l’appréciation de la cour sans qu’il y ait lieu d’écarter d’emblée ces éléments, étant ajouté qu’aucune demande nouvelle n’en découle et n’est au demeurant invoquée par les intimées dans le dispositif de leurs dernières écritures ; qu’enfin, le fait qu’un désistement soit intervenu à l’égard d’une partie est sans incidence sur la production aux débats d’un élément de preuve ;
Considérant dès lors que les intimées doivent être déclarées recevables mais mal fondées à contester la validité des procès-verbaux de constat d’huissier des 18 et 23 mars 2010 versées aux débats par l’appelante ;
Sur la mise hors de cause de la société Dr Martens Airwair France
Considérant que les intimées sollicitent la mise hors de cause de la société Dr Martens Airwair France au motif que si l’extrait d’immatriculation au Registre du Commerce de ladite société en date du 19 août 2010 (pièce 5 de l’appelante) mentionne que cette dernière exploitait l’établissement situé 12 rue Pierre Lescot à Paris 75001, aucune date en 2010, soit à l’époque dans faits, ne serait indiquée sur le document ;
Qu’il y a lieu toutefois de constater que cet extrait Kbis est en date du 19 août 2010 (pièce 5 de l’appelante) et qu’il mentionne un commencement d’activité de la société Dr Martens Airwair France le 10 août 2001 ; qu’en outre, le tribunal a justement relevé que le site internet www.drmartens.com renvoyait directement au magasin précité ;
Considérant, dès lors, qu’il n’y a pas lieu de mettre d’emblée hors de cause la société Dr Martens Airwair France, la responsabilité de cette dernière dans les faits incriminés relevant du fond du débat ;
Sur la contrefaçon
* par reproduction
Considérant qu’il a été précédemment exposé que la société JM Weston est titulaire de la marque verbale française J.M.Weston, déposée le 30 septembre 1986 sous le n°1 372 787 et dont le renouvellement partiel n’est pas contesté, pour désigner notamment en classe 25 les “chaussures en tout genre” et de la marque verbale française Weston, déposée le 22 décembre 1992 sous le n°92 447 086 et dont le renouvellement partiel n’est pas contesté, pour désigner notamment les “chaussures” ;
Que la cour n’a pas à statuer sur l’exploitation de ces marques qui ne fait l’objet d’aucune contestation ;
Considérant qu’aux termes de l’article L 713-2 a) du code de la propriété intellectuelle :
“Sont interdits, sauf autorisation du propriétaire, la reproduction, l’usage ou l’apposition d’une marque, même avec l’adjonction de mots tels que : “formule, façon, système, imitation, genre, méthode”, ainsi que l’usage d’une marque reproduite, pour des produits ou services identiques à ceux désignés dans l’enregistrement” ;
Qu’en l’esp è ce, il résulte des pièces versées aux débats, et notamment du procès-verbal de constat du 9 mars 2010 (page 16) que le site www.dmusastore.com exploité par la société Dr Martens E-Commerce LLC utilise, notamment à destination du consommateur français, et pour désigner des chaussures, le signe Weston, constituant la reproduction à l’identique du signe protégé Weston ;
Que de tels produits sont identiques à ceux visés à l’enregistrement de la marque opposée de sorte que l’atteinte à la fonction d’origine de la marque est réalisée, aucun risque de confusion entre les produits n’étant ici à établir ;
Que la contrefaçon par reproduction est ainsi caractérisée et que le jugement doit être infirmé de ce chef ;
Considérant s’agissant de l’emballage et de l’étiquette reproduisant également le signe Weston qui sont également incriminés à ce titre, qu’il résulte du constat d’huissier du 23 mars 2010 que la boîte de chaussures a été acquise auprès de la société Cloggs sur le site www.clogs.eu exploité à l’époque des faits pas la société Libcol Limited à l’égard de laquelle l’appelante s’est désistée ; que cette dernière, qui indique dans ses dernières écritures qu’ “elle ne peut décemment savoir laquelle des nombreuses entités de ce groupe (Dr Martens) a fourni Libcol en modèle litigieux” ne peut donc voir prospérer son action à l’encontre des sociétés intimées en la cause ;
* par imitation
Considérant qu’il résulte du même procès-verbal de constat du 9 mars 2010 que le site accessible à l’adresse www.docmartens.com que la société Airwair International LTD ne conteste pas exploiter, utilise, notamment à destination du consommateur français, et pour désigner des chaussures, la dénomination Wasp Weston 7 Tie Boot ;
Que les signes en présence étant différents, c’est au regard de l’article 713-3 b) du code de la propriété intellectuelle qui dispose que :
< /br>“Sont interdits, sauf autorisation du propriétaire, s’il peut en résulter un risque de confusion dans l’esprit du public, l’imitation d’une marque et l’usage d’une marque imitée, pour des produits ou services identiques ou similaires à ceux désignés dans l’enregistrement” qu’il convient d’apprécier la demande en contrefaçon ;
Qu’il y a lieu plus particulièrement de rechercher si, au regard d’une appréciation des degrés de similitude entre les signes et entre les produits désignés, il existe un risque de confusion dans l’esprit du public concerné ;
Que les produits désignés sous le signe incriminé sont identiques aux produits visés dans l’enregistrement des marques J.M.Weston n°1 372 787 et Weston n°92 447 086 s’agissant de chaussures ;
Que l’appréciation de la similitude visuelle, auditive et conceptuelle des signes doit être fondée sur l’impression d’ensemble produite par ceux-ci, en tenant compte, notamment, de leurs éléments distinctifs et dominants ;
Que d’un point de vue visuel et phonétique, le signe incriminé reprend en deuxième position le terme Weston constituant le seul élément verbal de la marque n°92 447 086 et l’élément distinctif et dominant Weston de la marque JMWeston n°1 372 787 dans laquelle il se détache des initiales JM qui ne retiendront pas l’attention des consommateurs ; que s’y ajoutent les mots Wasp 7 Tie Boot qui seront aisément compris par le consommateur concerné par le produit en cause comme étant purement descriptifs de celui-ci à savoir des chaussures à lacets montantes et comportant 7 attaches ;
Que sur le plan intellectuel, les signes en cause renvoient tous deux à un patronyme à consonance anglo-saxonne ;
Considérant qu’il résulte de ces éléments que l’identité des produits concernés alliée à la forte similitude entre les signes en cause pris dans leur ensemble entraîne un risque de confusion, le consommateur d’attention moyenne étant amené à attribuer aux services proposés une origine commune, ce d’autant que l’appelante justifie de la grande connaissance sur le marché considéré des marques qu’elle oppose dans le cadre du présent litige,
Que, dès lors, la contrefaçon par imitation est caractérisée et le jugement sera également infirmé de ce chef ;
Sur la concurrence déloyale et parasitaire
Considérant que la société JM Weston est immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés de LIMOGES sous cette dénomination depuis le 14 mars 1985 pour exercer une activité de fabrication et négoce en gros et détail d’articles chaussants ;
Que l’utilisation par les sociétés Dr Martens E-Commerce LLC et Airwair International LTD des signes Weston et Wasp Weston 7 Tie Boot pour proposer et commercialiser sur Internet des chaussures, est source de confusion dans l’esprit du consommateur ;
Que la concurrence déloyale est donc caractérisée de ce chef au préjudice de la société Weston ;
Que, par ailleurs, les intimées ne contestent pas l’existence d’un réseau sélectif de distributeurs agréés par la société JM Weston pour la commercialisation de ses produits ; qu’en commercialisant des chaussures dans les conditions ci-dessus décrites et en dehors de ce réseau, elles engagent donc également leur responsabilité au titre de la concurrence déloyale ;
Considérant, en revanche, que l’atteinte à la fonction d’origine des marques en cause dans les conditions sus-décrites a déjà été caractérisée ; que l’appelante ne caractérise dans ses dernières écritures aucun autre grief de concurrence déloyale ou de parasitisme et sera en conséquence déboutée du surplus de ses demandes ;
Sur la responsabilité de la société Dr Martens Airwair France
Considérant que les demandes de la société appelante concernant la contrefaçon par reproduction de la marque Weston n°92 447 086 sur l’emballage et l’étiquette des chaussures litigieuses ayant été rejetées, ses demandes dirigées à l’encontre de la société Dr Martens Airwair France ne peuvent prospérer ;
Sur les mesures réparatrices
Considérant qu’il sera fait droit, dans les termes définis ci-après au dispositif, aux mesures d’interdiction et de publication sollicitées ;
Considérant que la mise sur le marché des chaussures contrefaisantes a, en banalisant les deux marques dont la société JM Weston est titulaire, porté atteinte à leur valeur patrimoniale ;
Que les intimées ne sont contredites par aucun élément contraire lorsqu’elles indiquent que la société LIBCOL a vendu 17 paires de chaussures contrefaisantes ; que l’huissier instrumentaire a quant à lui constaté l’achat de la paire litigieuse au prix de 129,99 euros ;
Que la cour trouve ainsi dans la cause les éléments suffisants pour allouer à la société JM Weston la somme de 20.000 euros en réparation des atteintes portées aux marques dont elle est titulaire et celle de 15.000 euros en réparation des agissements déloyaux commis à son encontre ;
Que ces indemnités seront mises à la charge in solidum des sociétés Dr Martens E-Commerce LLC et Airwair International LTD ;
Sur les autres demandes
Considérant qu’il y a lieu de condamner in solidum les sociétés Dr Martens E-Commerce LLC et Airwair International LTD, parties perdantes, aux dépens qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile ;
Qu’en outre, elles doivent être condamnées à verser à la société JM Weston qui a dû exposer des frais irrépétibles pour faire valoir ses droits, une indemnité au titre de l’article 700 du code de procédure civile qu’il est équitable de fixer à la somme de 10.000 euros.
DECISION
Infirme le jugement rendu le 11 juillet 2014 sauf en ce qu’il a constaté le désistement d’instance et d’action de la société JM Weston à l’égard de la société Libcol Limited.
Dit que les sociétés intimées sont recevables mais mal fondées à contester les procès-verbaux de constat des 18 et 23 mars 2010.
Dit qu’en reproduisant la marque Weston n°92 447 086 sur le site www.dmusastore.com et en imitant les marques JM Weston n°1 372 787 et Weston n° 92 447 086 sur le site www.drmartens.com pour désigner des chaussures, les sociétés Airwair International LTD et Dr Martens E-Commerce LLC ont commis des actes de contrefaçon des marques JM Weston n°1 372 787 et Weston n°92 447 086 dont la société JM Weston est titulaire.
Dit que les sociétés Airwair International LTD et Dr Martens E-Commerce LLC ont, en outre, commis des actes de concurrence déloyale au préjudice de la société JM Weston.
Interdit aux sociétés Airwair International LTD et Dr Martens E-Commerce LLC la poursuite de ces agissements sous astreinte de 500 euros par infraction constatée à compter de la signification du présent arrêt.
Condamne in solidum les sociétés Airwair International LTD et Dr Martens E-Commerce LLC à payer à la société JM Weston la somme de 20.000 euros en réparation des actes de contrefaçon de marques ainsi que la somme de 15.000 euros en réparation des actes de concurrence déloyale.
Ordonne aux frais avancés des sociétés Airwair International LTD et Dr Martens E-Commerce LLC la publication du dispositif du présent arrêt à intervenir sur la page d’accueil du site www.drmartens.com/fr pendant une durée d’un mois à compter de la signification de la décision à intervenir, et ce sous astreinte de 10.000 euros par jour de retard.
Condamne in solidum les sociétés Airwair International LTD et Dr Martens E-Commerce LLC à payer à la société JM Weston la somme de 10.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
Rejette le surplus des demandes.
Condamne in solidum les sociétés Airwair International LTD et Dr Martens E-Commerce LLC aux entiers dépens qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.
La Cour : Marie-Christine Aimar (présidente), Sylvie Nerot (conseillère), Véronique Renard (conseillère), Carole Trejaut (greffière)
Avocats : Me Laurent Levy, Me Catherine Belfayol-Broquet, Me Richard Milchior
Notre présentation de la décision
En complément
Maître Catherine Belfayol-Broquet est également intervenu(e) dans l'affaire suivante :
En complément
Maître Laurent Levy est également intervenu(e) dans les 14 affaires suivante :
En complément
Maître Richard Milchior est également intervenu(e) dans l'affaire suivante :
En complément
Le magistrat Carole Trejaut est également intervenu(e) dans les 21 affaires suivante :
En complément
Le magistrat Marie-Christine Aimar est également intervenu(e) dans les 15 affaires suivante :
En complément
Le magistrat Sylvie Nerot est également intervenu(e) dans les 24 affaires suivante :
En complément
Le magistrat Véronique Renard est également intervenu(e) dans les 63 affaires suivante :
* Nous portons l'attention de nos lecteurs sur les possibilités d'homonymies particuliérement lorsque les décisions ne comportent pas le prénom des personnes.