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Condamnée pour avoir réservé le nom de domaine expiré d’un concurrent
Le fait de réserver sciemment le nom de domaine, tout juste expiré, d’un concurrent qui en avait un usage antérieur et identique à sa raison sociale, peut constituer un acte de concurrence déloyale, selon un arrêt de la Cour de cassation du 2 février 2016. La Cour a estimé que ce comportement était de nature à faire naître une confusion dans l’esprit du public entre les deux sociétés afin de capter la clientèle de la société titulaire originellement du nom de domaine.
La société Les Vents du Nord, spécialisée dans la vente et la restauration des instruments à vent avait enregistré le nom de domaine Lesventsdunord.fr en 2007. En 2010, elle ne l’avait pas renouvelé. Lorsqu’il est tombé dans le domaine public, la société Cuivres et bois l’a immédiatement réservé ainsi que la version en .com. Les Vents du Nord l’a mise en demeure de cesser d’utiliser le signe et de le lui transférer. Faute de réponse positive, elle a assigné Cuivres et bois en concurrence déloyale. La cour d’appel de Douai a donné tort à cette dernière et l’a condamnée à verser 15 000 € de dommages-intérêts à la société lésée, qui avait, depuis, fait faillite. La Cour de cassation a validé l’arrêt de la cour d’appel. Celle-ci avait relevé que le nom de domaine avait fait l’objet d’une exploitation effective publique par Les Vents du Nord, malgré la mention sur la page d’accueil : « site en construction ». Elle avait constaté que la page n’était pas vierge mais comportait le logo de la société Les Vents du Nord, ses coordonnées, heures d’ouverture, activités et renvoyait vers un contact joignable par email. Cette adresse de courriel étant insérée comme lien sur d’autres sites, le rachat du nom de domaine a eu pour effet de diriger automatiquement l’internaute cliquant sur le lien vers ce nom de domaine, donc désormais le site du concurrent. La Cour de cassation a approuvé la cour d’appel qui avait considéré que ne pouvait pas être forfuit, et était donc fautif, le fait d’enregistrer le lendemain de son expiration le nom de domaine du concurrent qui exerce la même activité très spécialisée, dans la même ville, à 700 mètres de distance.
La Cour de cassation a également estimé que la cour d’appel de Douai avait justifié sa décision en évaluant le préjudice subi à 15 000 €. Elle a d’abord retenu que le fait que le nom de domaine ne renvoyait plus vers un site, suite au litige, avait nui à l’attractivité de Les Vents du Nord et avait conduit à son déclassement dans les moteurs de recherche. Ensuite, elle a estimé que le comportement déloyal de Cuivres et bois avait porté atteinte à l’image de Les Vents du Nord associée à sa concurrente, par la confusion sciemment entretenue entre les deux sociétés dans l’esprit d’un public normalement attentif. Cuivres et bois a donc « contribué à diluer le pouvoir attractif du signe distinctif que constituent l’enseigne et le nom de domaine Les Vents du Nord ».