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Le public a droit d’accès aux codes sources des logiciels de l’administration
Dans une décision du 10 mars 2016, le tribunal administratif de Paris a affirmé que les codes sources d’un logiciel public sont des documents administratifs auxquels les administrés peuvent avoir accès. Il confirme ainsi l’avis du 8 janvier 2015 de la Commission d’accès aux documents administratifs (Cada). Pour la première fois, celle-ci avait affirmé que « les fichiers informatiques constituant le code source sollicité, produits par la direction générale des finances publiques dans le cadre de sa mission de service public, revêtent le caractère de documents administratifs, au sens de l’article 1er de la loi du 17 juillet 1978. ». En conséquence, ils sont communicables à toute personne qui en fait la demande, dès lors que cet accès ne porte pas atteinte à la recherche d’infractions fiscales et aux droits des tiers.
Tout a commencé voici deux ans, alors qu’un étudiant en économie effectuait un stage de deux mois au secrétariat général de la modernisation de l’action publique, à la mission Etalab. Il participait au développement d’OpenFisca, un logiciel de micro-simulation de l’ensemble du système socio-fiscal français. Pour ce faire, il devait coder toutes les situations et niches fiscales. Devant l’ampleur de la tâche, il s’est dit que c’était trop bête de recoder des dispositions, alors que l’administration fiscale l’avait déjà fait. Il a donc demandé l’accès au code source du logiciel à la direction générale des finances publiques (DGFip). Au bout de six mois, celle-ci a fini par opposer un refus à sa demande.
Ne baissant pas les bras, il s’est tourné vers la Cada, qui lui a donné gain de cause. Mais Bercy a continué de résister. Face au silence de l’administration, l’étudiant s’est donc tourné vers le tribunal administratif de Paris qui a confirmé la position de la Cada. Le tribunal rappelle que l’accès aux codes sources n’est pas exclu par la loi du 17 juillet 1978. Il réfute par ailleurs l’argument de la DGFip comme quoi cette mise à disposition serait contraire aux directives européennes de 2003 et 2013 car celles-ci portent uniquement sur la réutilisation des données mais pas sur l’accès aux documents administratifs. Quant au caractère évolutif d’un logiciel, le tribunal déclare que « si les programmes informatiques ont vocation à évoluer au gré des mises à jours, chaque version du code source d’un même programme informatique revêt le caractère de document administratif achevé et peut être communiqué dans cet état ; que, par suite, en l’absence de dispositions législatives ou réglementaires interdisant l’accès aux codes sources des programmes informatiques, le ministre des finances et des comptes publics ne pouvait légalement refuser de communiquer le document demandé ».
Sans attendre la position du tribunal, Bercy avait décidé de mettre les codes sources de ce logiciel en open source, sous licence Cecill 2. 1. Le ministère s’inscrit aussi dans le sillage du projet de loi pour une République numérique, voté par les députés le 26 janvier 2016, avec un amendement qui introduit les codes sources dans la liste des documents administratifs communicables au public.